Catherine Procaccia sénatrice (LR) rapporteur du 2e rapport de l'OPECST sur le chlordécone
Jeudi 30 mars 2023, Catherine Procaccia (Les Républicains) présente, devant la délégation sénatoriale aux outre-mer, les conclusions de son rapport d’information sur la chlordécone aux Antilles, fait au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Les mesures prises « ont été tardives et inadaptées à l’ampleur de la pollution ». La sénatrice Catherine Procaccia (LR), rapporteur du document de travail intitulé « l’impact de l’utilisation de la chlordécone aux Antilles françaises« , s’exprime sans détour. Le deuxième rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) soumis le 16 février 2023, est présenté au Sénat le 30 mars.

Les sénateurs Victoire Jasmin (PS), Victorin Lurel (PS) et Dominique Théophile (RDPI-Renaissance), ainsi que le député Olivier Serva (Liot) assistent à la présentation de l’OPECST qui exprime des inquiétudes concernant les lacunes dans la recherche sur les effets sanitaires de l’exposition au chlordécone.

L’office émet 24 recommandations, réparties dans 4 catégories. Certaines sont souvent évoquées dans l’opinion publique ou au sein des acteurs.

  • Recherche : Accompagner les chercheurs dans l’application pratique de leurs résultats, notamment en conditions réelles de terrain et à grande échelle, afin d’en faire bénéficier la population aussi rapidement que possible.
  • Communication : Tenir à jour un site internet regroupant l’ensemble des informations sur le chlordécone, dans un format adapté à l’ensemble de la population.
  • Chlordéconémie -mesure de la contamination- : Développer prioritairement les moyens d’analyse locaux afin de diminuer les temps d’attente pour la population.
  • Suivi et l’évaluation du plan : Assurer l’utilisation et le renouvellement de filtres à charbons actifs sur toutes les usines de traitement le nécessitant, afin d’atteindre un taux de conformité de 100 % pour l’eau potable.

Pour Stéphane Artano, sénateur de Saint-Pierre-et-Miquelon, président de la délégation sénatoriale aux Outre-mer, ce travail apporte« tous les éclairages nécessaires pour avoir ce matin un riche débat qui puisse préparer les prochains développements de ce dossier qui est assurément loin d’être refermé« .

Complexité, inefficacité, défaillance et défiance

Les problèmes de gouvernance et de financement ont été complexes et peu efficaces, aboutissant à un bilan qualifié de « globalement mitigé » par l’Office. Quant à la communication envers les populations, elle a tout simplement été « particulièrement défaillante ». Ce n’est pas mieux du côté du pilotage de la recherche critiqué pour l’inadéquation par rapport à l’ampleur des enjeux. Plus précisément, ce sont les effets sur la santé de l’exposition au chlordécone qui sont insuffisamment étudiés et demeurent encore largement méconnus. « Ces défaillances, face à une situation vécue comme un scandale, [ont entraîné] un sentiment de colère et de défiance dans la population, avec un impact négatif sur la perception de l’État et des institutions. Cela explique les difficultés d’adhésion aux dispositifs et aux recommandations émises par les services de l’État » soulignent les rapporteurs.

Le seul satisfecit concerne la dépollution, où les recherches actuelles sont prometteuses. « Pour la dépollution des sols, il existe actuellement trois pistes : l’utilisation de souches de bactéries pour stimuler la dégradation sur le terrain ; l’utilisation de réducteurs chimiques sur la couche superficielle du sol mais cela ne limite pas la transmission vers l’hydrosphère ; la séquestration de la molécule de chlordécone par le compost », a détaillé Catherine Procaccia.

Ces méthodes rencontrent cependant leur limite : l’utilisation de réducteurs chimiques est particulièrement coûteuse (de l’ordre de 160 000 euros/Ha), tandis que la séquestration de la molécule a « l’inconvénient de ne pas être pérenne, le compost devant être renouvelé régulièrement et la chlordécone étant seulement immobilisée et non détruite », analysent les auteurs de l’étude. « Nous demandons une expérimentation à grande échelle aux Antilles, mais il ne faut pas que les nouvelles molécules dégradées par les réducteurs chimiques soient plus dangereuses que le chlordécone« , averti Catherine Procaccia.

Le rapport appelle « l’État à tirer tous les enseignements des lenteurs, erreurs et faiblesses qui ont affecté la prise en charge des populations antillaises et nourri leur défiance ». Qu’il s’agisse de pesticides ou d’autres substances, la pollution des terres antillaises et des Antillais par le chlordécone lui apparaît « précurseur des futures pollutions qui seront découvertes au XXIe siècle », et des crises qu’elles vont déclencher.

Poster un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.