La projection du film documentaire « Personne n’y comprend rien », organisée par Le Courrier de Guadeloupe ce lundi 14 avril à 19 heures au Cinéstar aux Abymes, suivie d’un débat riche, a affiché complet. De nombreux spectateurs n’ont pas pu accéder à la salle. Une réussite telle, qu’une seconde séance a dû être organisée dès le lendemain soir, mardi 15 avril à 19 heures (photo ci-dessus).
Ce succès d’audience ne témoigne pas seulement de l’intérêt du public pour les affaires politico-financières ; il souligne aussi l’appétit des citoyens pour une information rigoureuse et indépendante, et conforte le rôle indispensable de la presse indépendante dans le débat démocratique.
Le film réalisé par Yannick Kergoat, qui dissèque les mécanismes opaques des soupçons de financement de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy par la Libye, confirme que le journalisme d’investigation reste un rempart contre les dérives du pouvoir.
Les enquêtes rigoureuses – à l’image du travail mené par Fabrice Arfi et Karl Laske de Mediapart, scénarisé dans ce film documentaire – constituent les sentinelles indispensables de la transparence démocratique. Elles éveillent les consciences et, surtout, elles réactivent un droit trop souvent oublié, « inaliénable » et « sacré », de « demander compte à tout agent public », au premier rang desquels, les élus.
Que le public guadeloupéen ait répondu présent est un signal fort. Il confirme que les citoyens réclament des clés pour comprendre les enjeux qui façonnent la vie publique. Ce succès est aussi une reconnaissance du travail acharné des journalistes qui, malgré les pressions, persistent à creuser, questionner et révéler.
Un débat éclairé
La richesse des échanges qui ont suivi la projection doit beaucoup à la qualité des intervenants. Hubert Jabot, avocat et vice-président de la section Guadeloupe de la Ligue des droits de l’homme, a rappelé l’importance de la défense des libertés publiques face aux dérives du pouvoir. Fred Reno, professeur de sciences politiques à l’Université des Antilles, a apporté un éclairage précieux sur les enjeux géopolitiques et institutionnels soulevés par le film. Éric Coriolan, président du mouvement citoyen Sentinelles Guadeloupe, a insisté sur la nécessité d’une vigilance citoyenne face à la corruption. Errol Nuissier, psychologue et expert judiciaire, a analysé l’impact des scandales politiques sur la psyché collective et la défiance grandissante envers les institutions.
« Quelles pressions subissent les journalistes, et comment y résistent-ils ? » a interrogé une spectatrice de 22 ans, étudiante en sciences. « Face aux pressions politiques, économiques, et même l’autocensure, cultiver la liberté est la meilleure réponse », ont répondu les journalistes présents dont Olivier Lancien de Guadeloupe la 1ère (Annick Fabrice de France-Antilles avait participé au débat de la veille). Cette réponse, simple en apparence, résume l’enjeu fondamental : sans une presse audacieuse, indépendante, la démocratie n’est qu’un mot creux.

Dans un contexte où les menaces contre la liberté de la presse se multiplient – intimidations, désinformation, concentration des médias aux mains des plus riches et puissants –, au Courrier de Guadeloupe nous avons vu dans cette soirée, un plaidoyer vibrant pour le quatrième pouvoir. La preuve qu’informer n’est pas un métier comme les autres : c’est une mission civique.
Espérons que cet engouement inspirera d’autres initiatives, car éclairer les zones d’ombre, c’est gagner une bataille contre l’indifférence. La démocratie a besoin de lumière, et le public aussi.
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