Autonomie, statut, assemblée unique, réforme institutionnelle, indépendance… 70 ans, que ces concepts – pas forcément dans cet ordre — hantent la vie politique en Guadeloupe. À ce jour, aucun d’entre eux n’a passé la rampe.

Pourtant, il est toujours de bon ton d’avoir au moins un avis sur la question. Davantage que quiconque, les élus locaux semblent aujourd’hui convaincus que le salut viendra d’une réforme institutionnelle. L’ennui c’est que pour n’avoir pas travaillé le sujet autrement qu’en sautant et en criant comme des cabris – comme dirait De Gaulle —, « il nous faut domicilier davantage de pouvoirs en Guadeloupe », ils ne savent pas quel tour donner à cette réforme. Ils sont juste convaincus, qu’il faut un changement qui les dotera – eux élus — de pouvoirs plus grands.

Certains revendiquent ce Saint Graal dès la première difficulté rencontrée dans la mise en place ou plus souvent, la non mise en place d’une politique publique. Partant, ils accablent de tous les maux le statut actuel qu’ils vivent comme un corset qui empêcherait la Guadeloupe d’avancer.

Ce qui a fait dire à Gérald Darmanin lors d’un colloque organisé par l’hebdomadaire Le Point à Paris le 2 février, que l’évolution institutionnelle « est un sujet d’élus, et malheureusement, je constate la même chose en Corse, c’est un sujet d’élus qui ne veulent pas toujours appliquer les compétences qu’on leur a données. Il faut qu’on ait la franchise de le dire aux ultramarins, et qu’il faut qu’on ait la franchise de le dire aux Ultramarins ». Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer insiste : « Les gens spontanément dans la rue ne vous parlent pas d’institution. Les gens, ils veulent le développement économique, un logement, plus de subventions, de sécurité, mais pas d’institution différente ».

Une position confortable et un discours facile qui sied de tout temps aux différents gouvernements. La fonction de ministre et l’emploi du temps de Gérald Darmanin ne lui ont certainement pas permis de façon significative de prendre le pouls des populations ultramarines sur ce sujet. Et d’ailleurs sur aucun autre.

Que les élus soient incapables de concevoir un projet viable à long terme avec des objectifs politiques, économiques, sociaux et culturels précis, à soumettre aux Guadeloupéens, a fortiori les en convaincre de son bien-fondé, est une chose. Qu’il n’y ait rien à changer dans le rapport entre des territoires ultramarins exsangues et un pouvoir central parisien qui s’habille encore d’oripeaux néocoloniaux est une tout autre histoire.

Ce colloque du Point est une nouvelle occasion pour Gérald Darmanin de reprendre le nouveau carouble du gouvernement : l’octroi de mer est source de tous nos maux. Notamment celui de la vie chère. Il faut le réformer. Entendez : Bercy doit prendre la gestion de cette recette fiscale qui rapporte aux territoires ultramarins 1,5 milliard d’euros.

Quelle que soit l’indigence de notre personnel politique dans le domaine, c’est un projet à rebours de toute politique de décentralisation, a fortiori d’émancipation politique. Dans la foulée, Gérald Darmanin recycle l’idée rance qui consiste à dire que sans la France les Ultramarins mourraient de faim. À quoi leur servirait une autonomie ?

« Vous n’aurez d’autonomie demain que si vous êtes capables de produire ce que vous mangez, ce que vous consommez comme électricité, et c’est par la richesse économique que vous aurez des recettes, pas par les subventions », estime le ministre. Sans doute… Alors, quand allons-nous enfin relever le défi ?

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