Accueil Pouvoir Opinion Éditorial Retraites : Une réforme au fer-chaud

Retraites : Une réforme au fer-chaud

La population refuse une réforme des retraites que le président de la République lui impose de force. La colère n’a pas fini de gronder.

 

En Guadeloupe la protestation contre la réforme des retraites n’a guère mobilisé. Pourtant les retraités guadeloupéens seront encore plus durement affectés par cette réforme. Betty Besry, directrice du service des retraites de la Caisse générale de sécurité sociale a démontré, chiffres à l’appui le 25 février devant 200 personnes réunis en Kan’la à l’invitation des élus d’élus Nupes, que la situation des retraités guadeloupéens est globalement trois fois plus désastreuse que celle des retraités de l’Hexagone. L’étude indique que les générations comprises entre 1961 et 1964 accusent de trous de carrière trois fois plus importants dans Outre-mer que dans l’Hexagone. La Guadeloupe détient d’ailleurs la palme de ce dur palmarès. Les personnes sinistrées par ces trous de carrière dépassent les 20 % alors qu’en France hexagonale, elles ne dépassent pas les 5 %. Autre phénomène aggravant : beaucoup de Guadeloupéens vivent du Revenu solidarité active (RSA). Dans le même temps, ils travaillent au noir. Résultat : ils n’apparaissent nulle part dans les fichiers de la sécurité sociale.

 

Le gouvernement impose sa vérité aux foules

Au niveau national, 70 % des Français se prononcent contre la réforme des retraites. 9 actifs sur 10 s’y opposent également. Le parcours de la loi a connu quelques obstacles, notamment avec une utilisation controversée de l’article constitutionnel 49-3 qui permet d’enjambe le vote des députés, et un échec de justesse à neuf voix près de l’adoption de la motion de censure du gouvernement déposée par les mêmes députés outragés. La question fondamentale est celle-ci : un président a-t-il le droit de forcer une loi que la majorité des citoyens rejettent ? Les gouvernants ont-ils un monopole du savoir absolu en matière économique, politique et social et tout compte fait dans tous les domaines au point qu’ils sont en droit d’imposer leurs vérités à la population sous prétexte qu’ils savent mieux qu’elle ce qui lui convient ? C’est le sentiment que donne le président de la République. Emmanuel Macron soutient dur comme fer que la réforme est vitale si l’on veut sauvegarder le système de retraite par répartition. À supposer que cela fût une vérité scientifique – ce qui est fortement contesté – la science affichée par des gouvernants ne prime pas sur la volonté, les besoins et les aspirations du peuple. En 1852 Victor Hugo décrivait déjà « le peuple français (…) battu de verges et marqué d’un fer-chaud pour un jurement (…) se mit en tête de demander des comptes à la monarchie ». La vie quotidienne des citoyens, caractérisée par la difficulté économique et la pénibilité du travail, est ignorée par ceux à qui ils ont fait confiance pour assurer le gouvernement de la Nation. Le président de la République au lieu de reconnaître la crise sociale et démocratique que traverse le pays, qualifie les manifestants de simples foules en colère. Emmanuel Macron affirme que la loi suit simplement son parcours normal. Et que la foule manifestante est ignorante et aveugle.

 

Une réforme jugée inutile, injuste et inappropriée

La réforme des retraites qui acte le recul de l’âge légal de la retraite de 62 à 64 ans divise et suscite la controverse. Certains la qualifient d’inutile, car il n’y a pas de déficit chronique à moyen terme. D’autres la jugent injuste, car elle pénalise les femmes et les travailleurs aux carrières précoces en les faisant travailler plus longtemps. D’autres encore estiment qu’elle est inappropriée, compte tenu de sa proximité avec la précédente période de crise du covid-19. Néanmoins, le gouvernement maintient que la réforme est nécessaire. Ce sont les propres mots du président de la République lors de l’interview qu’il a accordé aux chaînes de télé France 2 et TF1 le mercredi 22 mars. Emmanuel Macron a cité également l’augmentation de l’espérance de vie comme justification de la réforme. Espérance de vie qui tend cependant à stagner depuis quelque temps. Cette argumentation s’ajoute à celles de ceux qui soulignent que, dans d’autres pays européens, l’âge légal de la retraite est fixé à 67 ans. Tous ces arguments n’ont pas convaincu la population. La réforme des retraites au niveau de l’Hexagone a mis dans la rue des centaines de milliers, voire des millions de manifestants. La mobilisation a été impressionnante : 12 journées de manifestation étalées sur trois mois, en signe de contestation. Et ce n’est pas fini.

Poster un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.