Les deux camps interprètent l’audit en leur faveur
Pas de révélations sensationnelles, pas de magouilles avérées, pas d’abus illégaux. L’audit commandé par la majorité régionale, et débattu en assemblée plénière le 28 juin à Basse-Terre, stigmatise la gestion 2 015 de la Région et donne satisfecit aux années précédentes.
Hilaire Brudey, Christian Baptiste, Ary Durimel, Hélène Vainqueur, Audry Cornano fidèles à Victorin Lurel n’ont rien lâché au cours d’échanges fermes, parfois âpres et toujours cordiaux. Au centre du débat ce mardi 28 juin : l’audit des comptes de la Région commandé par la nouvelle majorité. L’auditeur, Michel Klopfer, est venu le présenter en personne dans l’hémicycle du conseil régional à Basse-Terre. À dire vrai, il n’y a pas eu de révélations sensationnelles. Pas de magouilles avérées, pas d’abus illégaux. Les analyses du spécialiste des finances locales ont le plus souvent répété pour l’essentiel des données qui avaient déjà circulé, à savoir que la capacité de désendettement de la Région est passée de 3,4 années en 2014, à 6,7 années en 2015. De même, l’auditeur a répété, comme l’avait déjà déclaré la nouvelle majorité, que la capacité d’engagement de la Région se trouve obérée par les programmations inscrites par la majorité précédente en 2015 : » Un déni de démocratie » selon Marie-Luce Penchard. La 2ème vice-présidente, et mairesse du chef-lieu Basse-Terre, a tonné : » Nous ne sommes pas venus mettre en œuvre ce que vous aviez prévu. Nous voulons appliquer le programme que nous avons défendu pendant la campagne. » Hilaire Brudey a soutenu que les autorisations d’engagement ne datent pas de 2015, mais ont débuté en 2004. Ary Durimel s’est réjoui que l’audit soit finalement dévoilé. » Globalement cet audit montre une bonne gestion. La montagne a accouché d’une souris » explique calmement le conseiller régional écologiste. Guy Losbar, 1er vice-président, n’en démord pas, le maire de Petit-Bourg parle de cavalerie. Il accuse les élus de l’opposition de faire des contorsions. Marie-Camille Mounien élue de l’opposition réplique du tac au tac. Elle n’accepte pas le mot contorsion. Bref, selon les élus de la majorité l’audit démontre que la gestion Lurel a plombé la Région pour les six ans à venir. Les élus de l’opposition répondent : » À vous de faire des choix. » Dans la dernière partie de son exposé, l’auditeur va en partie apporter de l’eau au moulin de la majorité. » La tendance n’est pas bonne, les territoires fragiles comme la Guadeloupe doivent faire preuve de prudence » explique-t-il. Pour ajouter aussitôt que les ratios se situent encore dans des normes acceptables. Ce à quoi s’accrochent Hélène Vainqueur et Audry Cornano, conseillers de l’opposition. Au final, chaque camp aura retenu de l’audit ce qui sert le mieux son discours politique.
Les solides références du cabinet Klopfer
38 000 euros. C’est le montant de l’audit commandé au cabinet Michel Klopfer, et débattu lors de l’assemblée plénière du conseil régional, mardi 28 juin. Plusieurs fonctionnaires ont confirmé au Courrier de Guadeloupe ce chiffre. L’auditeur Michel Klopfer dispose de solides références. Il est un spécialiste de la gestion financière des collectivités locales. Son cabinet a réalisé l’audit de 87 Départements, de 24 des anciennes Régions, de 109 communautés d’agglomération, de seize communautés urbaines et métropoles, sans compter ceux de plusieurs villes de plus de 100 000 habitants. Tout au long de sa présentation, l’auditeur a tenu des propos mesurés. Il a estimé que la gestion de la Région Guadeloupe était bonne, et que la collectivité a figuré en bon rang des Régions les mieux gérées de France. Et ce jusqu’en 2014. En 2015, la situation s’est dégradée, la capacité de désendettement s’est allongée, sans dépasser pour autant le seuil d’alerte qui se situe à douze ans. L’analyse prospective du cabinet Klopfer qui porte sur les six ans à venir, prévoit une situation financière difficile en raison de la diminution des dotations, et d’une marge de manœuvre et une capacité d’engagement restreinte.
Qui a fait fuiter l’audit ?
Certains organes de presse ont été destinataires de l’audit en avant-première. Ils n’ont pas pu faire de révélations fracassantes, puisque tout avait été déjà dit depuis le 4 avril 2016. En revanche, Hilaire Brudey, élu de l’opposition a déploré que le document ait fuité au profit de certains journalistes, alors qu’il n’a pas été adressé aux élus. Ary Chalus a affirmé la main sur le cœur qu’il n’y était pour rien. D’ailleurs selon ses dires, il a découvert l’audit juste avant l’assemblée plénière du 28 juin.
Le silence des boutefeux
Signe que le temps était plutôt à l’apaisement, les boutefeux de l’assemblée plénière du 4 avril dernier n’ont à aucun moment pris la parole. Seuls Olivier Serva, Guy Losbar, Marie-Luce Penchard et bien sûr Ary Chalus se sont exprimés lors des débats de cette assemblée plénière du 28 juin. Jean Bardail, Sylvie Gustave dit Duflot, et Dominique Théophile sont restés coi. De là à penser qu’il s’agissait d’une consigne de groupe… Il faut noter aussi que Victorin Lurel, précédent exécutif régional et chef de file de l’opposition, qui à lui seul focalise toutes les rancœurs, n’était pas présent lors de cette plénière du conseil régional. Le député de la 4ème circonscription a déclaré qu’il était retenu à Paris » par des travaux d’ordre législatif « .
La majorité présente un compte administratif 2 015 excédentaire, et s’abstient
Un excédent de 51 887 390,31 euros. C’est le résultat du compte administratif 2 015 présenté par l’exécutif régional. Les élus de l’opposition ont approuvé tous les chapitres du compte. La majorité s’est abstenue. Cette démarche qui paraît paradoxale s’explique. La majorité ne peut contester les chiffres qu’elle a elle-même présentés. Elle n’a pas voulu non plus les approuver. Un tel acquiescement apporterait de l’eau au moulin des élus de l’opposition qui répètent depuis la polémique qui s’est engagée sur les comptes et la gestion de la Région, que Victorin Lurel a laissé de l’argent dans les caisses. Selon Ary Chalus « ce chiffre est trompeur. C’est un résultat comptable. Il n’y a pas de trésorerie. » Hilaire Brudey lui répond : « Vous dîtes qu’il n’y a pas de trésorerie et dans le même temps vous affirmez avoir déjà payé 60 millions d’euros. Il faut savoir. « Tout le débat a tourné autour des fameux « restes à réaliser « . Ary Chalus a affirmé qu’ils sont déjà consommés. Le président de Région a demandé au directeur financier de l’institution, David Jancky d’expliquer à l’assemblée en quoi cet excédent du compte administratif n’était pas une donnée positive pour les finances de la Région. Le fonctionnaire s’est lancé dans un discours très technique qui n’a pas mieux éclairé les novices de la comptabilité publique. Du coup arguments et contre arguments, cette fois politiques, sont repartis de plus belle. Au moment du vote, la polémique avait baissé d’un ton. Le compte administratif a été adopté.
Ary Chalus décrète la paix des braves
Le président du conseil régional s’est montré avenant avec les membres de l’opposition. » Je serai attentif aux propositions des élus, qu’ils soient de l’opposition ou de la majorité « . Après 4 h 30 d’un débat nourri entre les élus de la nouvelle majorité du conseil régional et ceux de l’opposition sur l’audit des comptes de la Région et le compte administratif 2015, Ary Chalus a prononcé des mots d’apaisement à la fin de la plénière qui s’est déroulée mardi 28 juin dans l’hémicycle du conseil régional, aux deux tiers rempli. Un discours qui tranche singulièrement avec celui du d’avril dernier où les élus s’étaient férocement invectivés. » Les entreprises qui ont travaillé pour le compte de la Région seront payées » a poursuivi le président de Région, » dès lors que l’orthodoxie est respectée « . Cette paix des braves s’est confirmée lorsqu’Ary Chalus est descendu de son perchoir afin de répondre aux sollicitations de la presse. » Christian tu seras toujours mon ami » a déclaré Ary Chalus au maire de Sainte-Anne qui arborait un éclatant sourire. Quelques minutes plus tard, il donnait l’accolade à Hilaire Brudey. Le premier vice-président de Région, Guy Losbar a donné dans le même registre. Il a échangé des paroles avenantes avec quelques membres de l’opposition. Ary Chalus a renchéri : » Je n’ai rien contre l’ancien président Lurel. Quand nous nous voyons, nous nous parlons. «
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