Molinié englué
• Le maire de Terre-de-Haut est rattrapé par sa gestion douteuse. Il est à nouveau convoqué en correctionnel le 11 janvier 2018.
Le tribunal correctionnel de Basse-Terre n’a pas laissé de répit à Louis Molinié. Le Maire de Terre-de-Haut ne s’est pas présenté à la convocation du 11 décembre. Il devra obligatoirement se rendre au tribunal, le 11 janvier 2018 afin de répondre des faits qui lui sont reprochés. Louis Molinié est poursuivi pour avoir réalisé aux frais de la commune des travaux d’embellissement, de confort, au profit d’une quarantaine d’administrés. Coût total de l’opération 1 429 676,02 euros. Le tout sous couvert de rénovation d’habitat insalubre. Il est reproché au maire de Terre-de-Haut d’avoir favorisé la Sarl Gil et Alexandre Garcia dans l’obtention du marché qui a couvert les dépenses des travaux. Louis Molinié est accusé d’avoir créé à la mairie de la commune des emplois fictifs au profit de joueurs de l’équipe de football de Terre-de-Haut (AJSS) et d’avoir payé sur les fonds de la commune 116 294,47 euros au titre des frais de déplacement de cette association. Il est poursuivi pour détournement de fonds publics. La commune aurait payé à son profit, 911 bouteilles de champagne entre 2012 et 2015, une voiture haut de gamme à son usage exclusif, sans délibération du conseil municipal, des frais de carburant, des voyages. Louis Molinié a commandé à la Sarl Cynou événement 427 772,59 euros de prestation d’organisation d’événements. Sans aucun marché.
En toute bonne foi
Au cours de l’enquête menée par la gendarmerie dont Le Courrier de Guadeloupe a pu prendre connaissance, Louis Molinié a reconnu tous les faits qui lui sont reprochés. La manipulation du marché passé sous couvert de résorption d’habitat insalubre, les travaux d’embellissement dans les maisons d’une quarantaine d’administrés, etc. Le maire de Terre-de-Haut a indiqué en substance qu’il ne disposait pas de cadre A. On ne lui a pas dit que les actions qui lui sont reprochées étaient interdites. « La trésorerie a laissé passer de grosses factures et rejeté des petites« . Bref, selon Louis Molinié il aurait agi en toute bonne foi. À le croire, ce sont les Saintois qui ont profité de travaux dans leurs maisons les vrais coupables puisqu’il subissait leurs pressions. Il oublie de dire qu’ils sont tous des proches ou des partisans politiques. Quant aux dépenses de la commune au profit du club de football, il assume. C’était pour redorer le blason de Terre de Haut.
Une gestion douteuse
• La Chambre régionale des comptes avait déjà montré du doigt la gestion de Louis Molinié. La plainte au procureur de la République de trois conseillers municipaux a enfoncé le clou.
Terre-de-Haut, son église, sa baie réputée, ses tourments d’amour et son charme ineffable. Selon plusieurs habitants de l’île, derrière cette image de carte postale une lutte acharnée afin de diriger cette petite commune de 1 800 habitants a toujours prévalu. « Une fois qu’ils y sont, les maires s’accrochent à la mairie comme des sangsues. Souvent ils font n’importe quoi », assure Pierrot, technicien du bâtiment à la retraite. Il dit en connaître un rayon sur les entourloupes et les passe-droits. Arrivé en 2000 à la tête de la commune Louis Molinié hérite d’une situation financière déjà désastreuse, laissée par l’ancien maire Robert Joyeux. La gestion du nouveau maire va enfoncer encore plus la commune. En 2013, le déficit s’élève à près de 3,5 millions d’euros. En avril 2016, le déficit du compte administratif a bondi à 5 millions d’euros. À cette occasion, la Chambre régionale des comptes rend un avis sévère sur la gestion de Louis Molinié. Dans leur rapport, les magistrats financiers soulignent que les faits relevés peuvent entraîner l’application de l’article L-2122-16 du Code des collectivités territoriales. Lequel stipule que le maire et les adjoints peuvent être invités à donner des explications sur leur gestion. Ils peuvent être suspendus par arrêté ministériel pendant un mois. Cet avertissement de la Chambre régionale des comptes laissait déjà planer la menace d’une suite pénale à la gestion du maire. La plainte en dénonciation de faits délictueux au procureur de la République déposée par trois conseillers municipaux de la commune a accéléré le processus. La plupart des infractions retenues par le parquet à l’encontre de Louis Molinié sont contenues et détaillées dans la plainte. Le procédé qui a permis les travaux dans les résidences de certains habitants est bien décrit. Les auteurs de la plainte indiquent que les éléments qu’ils communiquent « mettent en évidence un véritable système frauduleux au sein de la mairie ». Selon eux, « l’exécutif local fait un usage très clientéliste des deniers publics. Il en profite lui aussi et conforte ainsi ses revenus et son train de vie« .
Repères
Non au préfet
Plutôt coopératif lors de l’enquête de gendarmerie, Louis Molinié n’a pas toujours été dans cet état d’esprit. Le 27 novembre dernier le préfet par courrier a demandé au maire de Terre-de-Haut (Les Saintes), de soumettre au conseil municipal un mémoire d’Hilaire Brudey qui demandait au tribunal de l’autoriser à se constituer partie civile au nom de la commune, dans la procédure pénale engagée à l’encontre du maire. Conformément aux dispositions de l’article R.2132-1 du Code des collectivités territoriales. Par courrier daté du 28 novembre dernier, Louis Molinié a indiqué au préfet qu’il refusait de saisir le conseil municipal au motif qu’Hilaire Brudey n’a pas demandé au préalable au conseil d’exercer ce recours et que sa demande n’est pas suffisamment précise quant à la nature de l’action en justice envisagée.
Terre-de-Haut partie civile
Louis Molinié n’a jamais convoqué le conseil municipal. C’est le tribunal qui au final a autorisé Hilaire Brudey à se constituer partie civile au nom de la commune de Terre-de-Haut.
Coupez la lumière!
D’après plusieurs membres de l’opposition municipale, Louis Molinié n’avait pas une attitude très démocratique lors des réunions du conseil municipal. Il refusait régulièrement la parole aux conseillers de l’opposition. Un conseiller municipal raconte qu’une fois, non seulement il a refusé de donner la parole à l’opposition, il a aussi éteint les lumières. Il signifiait ainsi la fin au conseil municipal. « Le maire agissait comme si rien ne pouvait lui arriver. Il s’arrogeait tous les droits », observe cet élu.
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