Le 29 avril, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) notifiait à Karukera TV, projet de télévision généraliste guadeloupéen sa sélection en vue de la diffusion d’un service de télévision locale privée en Guadeloupe. Le lancement de Karukera TV intervient dans un contexte tendu qui a vu en outre-mer, la fermeture de nombreuses télévisions locales privées : Le CSA a lui-même souligné cette fragilité dans un rapport qu’il a publié en 2009 sur « les modalités de développement de la TNT dans les collectivités d’outre-mer» qualifiant « d’extrême précarité » la situation des télévisions locales privées en outre-mer. Or de manière fort surprenante, le CSA, en relation avec Canal satellite Caraïbes, attribuait le 30 avril à ATV le seul canal de diffusion disponible chez cet opérateur, en autorisant une déclinaison guadeloupéenne de la télévision martiniquaise ATV. La future chaîne guadeloupéenne se voit ainsi privée d’une visibilité sur le satellite de même que de la reprise des programmes de TF1 et de M6 pourtant autorisée par le CSA. Par ailleurs, le CSA fragilise le modèle économique de la chaîne guadeloupéenne car il introduit une concurrence sur un marché qu’il sait étroit. Il est vrai que le conseiller outre-mer du CSA n’a jamais caché sa volonté d’attribuer à ATV les marchés de Guadeloupe et de Guyane dans le souci de la protéger d’une liquidation. On protège ATV selon le principe de critères pas vraiment éthiques mais on veut tuer dans l’œuf la télé guadeloupéenne avant même qu’elle ait commencé à émettre. Peut-on me dire au nom de quoi ? C’est dans ce contexte de contraction du marché économique guadeloupéen, et alors que la chaîne guadeloupéenne n’est même pas encore autorisée à diffuser ses programmes, qu’on découvre que le CSA a lancé -vite fait- un nouvel appel à candidature sur la TNT en Guadeloupe. Trop fort ! Seul le marché guadeloupéen subit une telle frénésie, alors que celui de la Martinique est protégé dans le souci de permettre les conditions d’existence d’ATV. Ceci n’est rendu possible que parce qu’il existe un intense lobbying martiniquais qui œuvre pour que la Guadeloupe soit l’arrière-cour de la Martinique. Les agents économiques et les politiques martiniquais ont toujours été clairs dans leurs intentions et les moyens qu’ils déploient pour atteindre cet objectif. Ils connaissent la puissance d’un outil comme la télévision. Serge Letchimy a publiquement indiqué qu’il avait octroyé grassement 750 000 euros à ATV au titre d’un contrat d’objectif et de moyens (COM). Je ne sache pas que cela ait soulevé l’ombre d’un débat en Martinique. Et les Martiniquais sont assez culottés pour solliciter aussi de la Guadeloupe une COM, le moment venu. Or, nos élus jouent les effarouchés comme si cela ne valait pas la peine de se battre pour que culturellement, politiquement, économiquement, médiatiquement, la Guadeloupe défende son identité propre. Il y a belle lurette que la gestion administrative des départements est dépassée. La Guadeloupe et la Martinique sont entrées dans une logique de territoire. A ce titre je le répète encore, les intérêts de ces deux territoires deviendront de plus en plus divergents quand ils ne seront pas carrément antagonistes. Mais cela dit, nous pouvons toujours choisir d’être d’éternels vassaux !
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