Le quart de la population guadeloupéenne c’est-à-dire 104 000 personnes qui vivent sur des allocations versées au titre du RSA, cela devrait nous interpeller tous autant que nous sommes. À ceux-là il faudrait ajouter les bénéficiaires d’allocations-chômage et cela nous donne une idée de la masse conséquente d’argent mobilisé en faveur de ceux qui vivent en marge de l’emploi. Bien sûr les fraudeurs s’en donnent à cœur joie et profitent de la générosité du système. Une société ne peut avoir pour fondement éthique la triche permanente érigée en mode de vie. Et ce, n’en déplaise à tous ceux qui vénèrent nos vieux proverbes populaires trop vite dégainés à la moindre occasion. Débouya pa péché, kontriban’n pa défandi sé ga a la douan’, la poul ka gwaté sé la pouy bekté, sans doute. En quoi tout cela fait avancer une société ?
Il ne s’agit pas de croire non plus que seule notre société présente cette propension à la fraude. Les Guadeloupéens dans leur ensemble ne sont ni plus, ni moins vertueux que d’autres peuples. En revanche, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Pas seulement au niveau des lois physiques mais aussi dans les sociétés humaines. Autrement dit un système trop permissif engendre toujours la violation de règles devenues trop laxistes pour en être vraiment. Et pour rester dans le ton le proverbe la bayè ba, sé la bef ka soté illustre parfaitement le mécanisme à l’œuvre.
Tout cela posé. La fraude ou le laxisme au niveau de l’application des règles n’épuise pas la réalité du problème auquel nous sommes confrontés. La question est : » Pourquoi le budget RSA du conseil départemental augmente tous les ans de façon vertigineuse ? » La vraie réponse n’est certainement pas parce que les fraudeurs sont de plus en plus nombreux, même si dans l’absolu cela pourrait être vrai. Le Département voit s’alourdir d’année en année la part consacrée au RSA parce que la Guadeloupe fabrique chaque année plus de chômeurs et cela ne date ni d’aujourd’hui, ni d’hier. Le RSA contribue juste à rendre la vie des plus démunis moins difficile aujourd’hui qu’elle ne l’était dans les années soixante. Et tant pis si ceux qui n’en ont nul besoin viennent se repaître dans la mangeoire toute honte bue.
Le chômage, voilà la plaie. Comment endiguer ce fléau ? Même si les hommes politiques continuent à promettre la lune sur ce chapitre, personne n’a la réponse. Les partisans d’un libéralisme à tout crin ont longtemps chanté à tue-tête les louanges de la défiscalisation. Le dispositif devait accomplir des prouesses. Certains – en réalité les mêmes — s’en sont mis plein les poches. Là aussi les tricheurs ont été de la partie. Les grandes entreprises installées en Guadeloupe, y compris les multinationales, se sont bien gavées. Des hôtels construits à l’aune de sa sainteté défiscalisation, sont devenus des friches une fois engrangées le profit. Quant au miracle de l’emploi, il a plutôt tourné au mirage.
Les partisans de l’économie administrée n’ont pas mieux réussi. Emplois aidés, sureffectifs dans la fonction publique et plus particulièrement dans les mairies, là ou droite et gauche ont communié au même calice du clientélisme et de l’électoralisme. Tout cela non plus n’a pas suffi. Le chômage, et plus particulièrement le chômage de masse, continue de plus belle sa chevauchée époustouflante. Or, tant qu’il n’y aura pas d’embellie sur le front de l’emploi, l’équation du budget galopant du RSA restera posée.
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