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Indicible Lamentin

Lamentin. Son église, sa mairie. Son centre bourg étriqué, son territoire tellement rural et éparpillé, les actes de vandalisme qu’elle subit et sa propension si démesurée à faire parler d’elle et à occuper les devants de la scène. Paradoxe ? Apparemment, sans doute. Apparemment seulement. Lamentin c’est aussi une histoire, des lieux, un passé, des vécus, des mythes proches de mirages, des personnalités fortes. Sur le tréfonds de ces substances, une trame, une idée de la ville, le récit s’est forgé. Lamentin c’est l’imaginaire au pouvoir. Deux sites participent à cette diffusion imperceptible d’une identité plus virtuelle que réelle. Le premier est l’usine de Grosse Montagne, aujourd’hui en ruines. C’est le symbole par excellence de la décadence de la filière canne-sucre. La friche industrielle qui peut se transformer en danger mortel en cas de cyclone s’affiche fièrement sur le bord de la route de Desbonnes. 22 ans après sa fermeture, l’usine décatie sert toujours de référence aux nostalgiques d’une époque révolue. Personne, aucune autorité n’a songé à valoriser ce qui est devenu un tas de ferrailles. Le mythe de Lamentin, bassin sucrier, s’est transformé en mirage. Peu importe. Seul compte la perpétuation du récit.

Ravine Chaude est l’autre lieu quasi magique auquel se réfèrent tous les Lamentinois. C’est aussi un sujet énorme de crispation politique. Tous les candidats au poste de maire ont compris le formidable symbole que charrie le site. Le maire qui réussit Ravine Chaude réalise une mandature qu’il va pouvoir vanter. Reinette Julliard a échoué dans la gestion du dossier. José Toribio s’y est cassé les dents. Le mirage de la station thermale haut standing avait fini par l’aveugler. Il s’est brûlé les ailes. Ravine Chaude va vivre sa énième renaissance. Le chemin qui mène au mythe reste cependant semé d’embûches. Lamentin c’est aussi une idée – bien réelle celle-là — de la culture. Le ciné-théâtre de la ville est un bel espace, réputé pour la qualité de ses équipements et la notoriété des manifestations qu’il accueille. Terra festival et le FEMI en sont des exemples significatifs. La médiathèque a elle aussi de l’allure. Elle accueille de nombreuses activités. Enfin, Lamentin c’est une excellente école de musique, une tentative d’implanter une école d’art plastique. Elle n’est plus. L’âme lamentinoise est toutefois comblée, l’école a réussi à marquer les esprits.

Lamentin vaut aussi par ses fils. La première personnalité du terroir qui se détache est René Toribio. L’homme est réputé inflexible. Ancien maire, ancien sénateur, ancien président du conseil général, René Toribio a la réputation d’être intransigeant. Il symbolise la droiture, la force et aussi une forme d’indocilité. Et puis il y a Marcel Dagonia dont tout le monde retient qu’il a été sénateur. Rien d’autre. Cela suffit à ériger le docteur mais aussi son nom en référence. Ces deux patronymes et de façon moindre quelques autres, focalisent la vie politique dans la ville. Les modèles ne sont plus là. Place aux mythes ou aux mirages. Certains Lamentinois ont du mal à tourner la page. Du coup, la campagne électorale qui n’a pas perpétué les mythes et consacré leurs icônes, se prolonge au-delà des résultats du scrutin. Elle devient quasi permanente. Les médias alimentent volontiers la querelle. Ils suscitent des joutes verbeuses sur des faits qui devraient rester au rang d’infâmes faits divers graves, justes propres à être dénoncées. Il reste pourtant des chantiers entiers à mettre en œuvre à Lamentin. Ils permettraient au territoire d’épouser son temps, d’avancer dans d’autres réalisations. La ville jouit d’un atout que pourrait lui envier nombre de cités en Guadeloupe. Après une petite période de recul, Lamentin fait partie des rares communes de Guadeloupe à voir sa population continuer à augmenter. Cette réalité fait taire tous les discours. À condition de garder le cap.

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