Nous sommes tous responsables et coupables de la violence

ÉRIC JALTON

La vague de violence sans précédent qui secoue la Guadeloupe, le développement économique du pays, les grands chantiers à venir, le rôle de la communauté d’agglomération Cap excellence dans l’évolution de la conurbation Pontoise. Éric Jalon député-maire des Abymes s’explique sur tous ces sujets et aussi sur sa relation avec le LKP.

Éric Jalton

Éric Jalon : La violence est le fruit de la société dans laquelle on évolue. Elle n’est pas née du néant. Les comportements sont devenus violents, les mœurs sont violentes, notre modernité est violente, la mondialisation est violente, la musique, les films font un culte à l’hyper-violence. À combien de meurtres assiste un téléspectateur devant son petit écran chaque jour, banalisant pour des jeunes esprits poreux le passage à l’acte. Et nous feignons l’étonnement devant cette montée de la violence. J’ai récemment dit que nous étions tous coupables et tous responsables. Le délitement des solidarités, du lien intergénérationnel, la perte de repères, la paupérisation de notre jeunesse livrée aux affres du chômage sont autant de facteurs qui alimentent cette violence au quotidien, l’individualisme né de l’ultralibéralisme qui irrigue notre société, prônée au cours de la dernière décennie par certains gouvernements est aussi un facteur de violence sociale. Pour en sortir, je prône la mise en place de politiques publiques massivement tournée vers la jeunesse, la prépondérance du politique sur le financier, car les richesses d’un territoire ne sont pas que financières mais désormais dans le maintien et l’amélioration du cadre de vie. Une forme d’urbanisme privilégiant le bien-être de l’homme et la transition écologique et énergétique.

Le Courrier de Guadeloupe : Quels leviers les élus peuvent-ils actionner pour apporter leur part à l’éradication de ce fléau ?

Les leviers résident dans la mise en place d’instances de concertation, de médiation sociétale pour une meilleure répartition des richesses produites en Guadeloupe, car sur un petit territoire comme le nôtre, les écarts de revenus sont de plus en plus visibles et dans un rayon de moins de 5 km autour des zones résidentielles partout en Guadeloupe, de vastes territoires paupérisés se font jour. Je crains fort, si nous n’y prenons garde, la prochaine révolte de la jeunesse, parfois très diplômée que je reçois en tant que chef d’édilité de la ville la plus peuplée de la Guadeloupe. Nous sommes dans l’urgence sociale déclarée et s’il faut réprimer fermement et sans relâche les actes de violence et de délinquance pour mettre un terme au cercle vicieux de la violence en nous attaquant aux filières de trafics d’armes, de drogue et d’or, vecteurs éminemment de bandes plus ou moins organisées, de délinquants en tous genres, nous devons dans le même temps mettre en place un cercle vertueux de la formation, de l’insertion, de l’employabilité et de la resocialisation de notre jeunesse. C’est sur cette base que j’ai créé le pôle FIER aux Abymes, véritable maison communale de l’emploi qui n’a pas vocation à se substituer au service public de l’emploi en Guadeloupe mais à compléter, aux côtés de la Région et du Conseil Général, les missions régaliennes de l’État en matière d’emploi en nouant des partenariats répondant aux attentes spécifiques du territoire. Je peaufine l’observation du territoire abymien en termes de statistiques par la récente création d’un observatoire territorial, outil d’aide à la décision permettant de faire mieux correspondre les attentes et les besoins de mes concitoyens à l’allocation publique des ressources dont dispose le territoire abymien, ressources et richesses qui ne sont pas que financières, je le reprécise…

Pôle FIER aux Abymes, maison communale de l’emploi

Vous avez été très offensif lors de la crise sociale de 2009, vous avez pris parfois des positions très dures à l’égard de l’État. Vous vous êtes présenté aux élections régionales en rupture avec votre parti le PS et contre Victorin Lurel, depuis plus rien de très significatif. Quelle est aujourd’hui l’analyse d’Éric Jalon sur la situation politique, économique et sociale de la Guadeloupe ?

Sur le fond j’ai pris des positions qui étaient conformes à mon projet législatif. Sur la forme je pense que, à gauche, nous n’aurions pas dû laisser au LKP, l’exclusivité des revendications sociales, sans prôner pour autant la révolution. Une coalition  » mouvement social « , patronat et population aurait pu faire comprendre à l’État la nécessité d’avancées sensibles, tant sur le plan économique que social. L’État ultralibéral de droite qui va jusqu’à prendre langue avec le front national en prônant le racisme, le malthusianisme, le repli sur soi, le développement indigène, endogène oui je ne cesserai jamais de le dénoncer en tant que militant progressiste guadeloupéen. Par ailleurs, le socialisme est consubstantiel du mouvement social. Je ne pouvais rester sourd aux légitimes souffrances du peuple de la Guadeloupe. Cependant s’il faut un temps pour la rue, il faut un temps pour les urnes et c’est là mon désaccord profond d’avec les leaders du mouvement de 2009. Le dernier mot revient dans une démocratie aux élus du peuple. Nous le voyons aujourd’hui dans les printemps arabes après le temps de la rue, ce sont les urnes qui stabilisent la construction démocratique. C’est là, le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres. Je ne m’inscris pas dans le chœur des chantres du déclin, du pessimisme larmoyant… Nous sommes dans une république solide, dans un ensemble européen qui en dépit de ses difficultés actuelles exerce encore une grande influence dans le monde en mutation dans lequel nous devons savoir faire montre de talents. La Guadeloupe dispose de nombreux atouts dont elle doit savoir jouer. Une situation géopolitique relativement stable dans une grande Caraïbe en construction, une technostructure formée et diplômée, un entreprenariat dynamique, une pléiade d’acteurs culturels et sportifs de renommée mondiale que nous envient des territoires autrement plus importants en surface et population mais dont la visibilité mondiale est autrement plus réduite, une richesse en biodiversité dont nous commençons à percevoir le potentiel… un positionnement géographique dans un bassin de croissance tiré par les géants nord-américain et canadien, et les émergents tels que le Brésil et le Venezuela. Il nous faut donc regarder la Guadeloupe autrement que par l’hypermédiatisation de ce qui va mal et insister un peu plus sur nos forces et notre potentiel dans un environnement mondial où règne une compétition laissant peu de place à ceux qui se plaignent et geignent. En attendant un monde nouveau et solidaire, il faudra se battre pour exister.

Éric Jalton

 

Vous avez lors du dernier congrès des élus prôné la prudence et déconseillé toute précipitation en exhortant d’éviter de donner tous les pouvoirs à un seul homme ou une seule femme. Quelle est votre position précise sur l’éventuelle évolution institutionnelle de la Guadeloupe ?

Comme feu Frédéric Jalon, je suis pour une assemblée unique, collectivité unique regroupant les compétences de la Région et du Département, à exécutif unique pour gérer un peuple unique dans le cadre de l’article 73 de la constitution rénovée. Avec des contre-pouvoirs et une équité territoriale et politique dans la représentation élective en mixant scrutin proportionnel et scrutin majoritaire.

Comment jugez-vous l’action du ministre des outre-mer Victorin Lurel, en êtes-vous satisfait ? Sur quel dossier êtes-vous le plus satisfait et lequel vous paraît le moins bien traité ?

En premier lieu, j’appartiens au Groupe Socialiste Républicain et Citoyen de l’Assemblée nationale qui soutient le président François Hollande et son Gouvernement et donc naturellement Victorin Lurel, ministre des outre-mer qui fait jusqu’ici, dans l’exercice de ses fonctions, un parcours remarquable à l’instar de ses collègues ultramarines George Pau Langevin et Christiane Taubira au sein du gouvernement conduit par Jean-Marc Ayrault. La loi de régulation économique dans les outre-mer que j’ai votée est l’illustration de ce que la volonté politique peut faire quand elle s’attaque aux monopoles de l’import distribution héritée de l’économie de plantation et de l’exclusif colonial colbertiste. C’est un combat de longue haleine. J’ai souhaité pour ma part voir étendre la possibilité de saisine de l’Autorité de concurrence par les établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) en sus de cette possibilité offerte aux régions ultramarines et également renforcer le dispositif des sanctions en cas de droit d’importations exclusif. Je ne désespère pas de faire évoluer la loi en ce sens si le dispositif d’évaluation mis en place met en évidence le besoin de ces deux dispositions. Je salue aussi l’opiniâtreté de Victorin Lurel pour maintenir le dispositif d’incitation fiscale à l’investissement productif dans nos régions. Je travaille sur de nombreux dossiers avec le ministre. C’est une aubaine pour la Guadeloupe et ses forces vives de disposer à temps plein d’un des siens les plus écoutés, à l’intérieur du gouvernement de la République.

Que pensez-vous des dispositions prises par l’autorité de la concurrence qui intime à la CMA-CGM de revoir ses pratiques commerciales pour faire baisser le coût du fret entre la France et les Antilles Guyane, et comment être sûr que ces directives seront suivies ?

C’est là l’une des premières applications de la loi Lurel sur la régulation économique dans nos régions. Les sanctions sont dissuasives et CMA-CGM ne pourra pas longtemps faire la sourde oreille. C’est un dossier où le politique doit imposer sa légitimité démocratique tirée du suffrage universel à l’acteur économique uniquement soucieux de retour sur investissement à deux chiffres pour ses actionnaires. Au détriment des consommateurs des Antilles et de la Guyane. Il faut tourner la page d’un quasi-monopole dans l’intérêt de nos concitoyens.

Comment voyez-vous le développement économique de la Guadeloupe ? Quelle place doit y prendre la production locale ou alors sommes-nous condamnés à demeurer une société dont l’économie est essentiellement basée sur l’import. Sinon quels outils mettre en place pour sortir de cette logique ?

Le développement économique ne peut qu’être désormais dans l’optique du développement durable de notre territoire privilégiant le bien-être de ses habitants et la cohésion sociale. Une course à la croissance économique qui épuise les ressources du territoire en produisant certes des richesses financières mais dans le même temps des catastrophes écologiques comme l’utilisation de la molécule chlordécone, est-ce du développement ou est-ce de la régression ? Tous nos actes économiques doivent se décider sous la mesure de l’empreinte écologique qu’ils produisent sinon nous courrons à notre perte. Surtout dans un petit territoire insulaire comme le nôtre. Comme disait François Mitterrand  » les intérêts et droits des gens d’aujourd’hui ne doivent pas prévaloir systématiquement sur ceux des gens de demain.  » La production locale ne peut s’exonérer de l’indispensable transition écologique et énergétique que nous devons privilégier. La Guadeloupe ne dispose pas de ressources indéfinies compte tenu de sa taille. Le recours à l’importation est inéluctable. Mais il faut aussi savoir faire preuve d’inventivité, nous avons des ressources. Nous savons fabriquer certains produits du terroir qui sont de qualité mondialement reconnue. Il y a un effort à faire sur le packaging, sur l’ultra qualité qui fait la différence concurrentielle. La diversification économique, notamment agricole, créatrice de valeur ajoutée et vecteur de production et de consommation locales, est incontournable et doit être encouragée par les pouvoirs publics.

Les entreprises du BTP se plaignent d’un dumping social exercé par des entreprises venues des autres pays de l’Europe le Portugal en particulier. D’abord avez-vous eu vent de cette affaire ? Qu’en pensez-vous ? Est-il encore possible de protéger les entreprises guadeloupéennes compte tenu de la législation européenne sur les marchés publics ?

Comme je l’ai signalé plus haut nous appartenons à l’Union Européenne. La réglementation européenne s’impose donc pour l’heure à nous. Je vous le répète. Il faut cesser de larmoyer et s’organiser pour faire évoluer la réglementation. Nous sommes représentés au sein de l’Union Européenne d’une part par notre État membre et d’autre part au sein du parlement par des députés ultramarins très actifs. Il faut aussi renforcer notre lobbying auprès des instances européennes. La Réunion est beaucoup plus active que nous en la matière. Madère et les Canaries aussi. Le monde est une compétition, en attendant une hypothétique évolution spécifique de la législation communautaire il faut savoir s’organiser. Combien de fois ai-je insisté auprès des acteurs économiques locaux afin qu’ils se regroupent pour répondre à des appels d’offres. L’individualisme économique est aussi une forme de  » violence passive « .

Votre ville des Abymes est l’un des piliers de la communauté d’agglomération Cap Excellence devenu le fer de lance du développement de la conurbation Pontoise. Comment voyez-vous le rôle de cette collectivité ? Quels sont les grands projets à venir et comment s’articuleront désormais les domaines de compétences et les actions spécifiques entre votre ville et Cap Excellence ?

Jacques Bangou et moi avons beaucoup œuvré pour réussir Cap Excellence, dans un contexte passionnel hérité de nos ascendances respectives. L’intercommunalité est une chance pour nos territoires. Elle nous oblige à transcender nos querelles de clocher et à penser de manière intelligente le territoire de l’agglomération centre de la Guadeloupe. Compte tenu des défis et des enjeux, dans un contexte de raréfaction de la ressource financière, nous devons rechercher chaque fois que possible, les économies d’échelle et penser le territoire à l’échelle des Abymes, de Pointe-à-Pitre et désormais de Baie-Mahault. C’est un challenge et une forte responsabilité. Nous avons en avril 2012, réalisé à l’occasion d’un forum sur l’intelligence territoriale associant les 3 villes le recensement des projets sur les 10 ans à venir. Ce sont près de 3 milliards d’euros d’investissements publics et privés qui irrigueront l’agglomération Abymes, Pointe-à-Pitre, Baie-Mahault : reconstruction du CHU, construction du centre de gérontologie, rénovation urbaine RUZAB, RUPAP, développement rural durable des Abymes, technopole du morne Bernard, Tram Excellence, multiplex cinématographique, ZAC de Dothémare Providence, aéropôle, antillopole, pôle de compétitivité sur la logistique et le transport etc. Nous avons défini, au regard de la loi, les compétences obligatoires qui relèvent de Cap Excellence et les compétences optionnelles que nous souhaitons transférer. Le processus de transfert se construit chaque jour en bonne intelligence.

La nouvelle loi électorale sur les élections municipales introduit concomitamment l’élection des délégués communautaires eux aussi au suffrage universel, est-ce pour vous une avancée démocratique ? Comment allez-vous gérer cette nouvelle donne au sein de votre équipe ?

C’est une avancée démocratique que je gère dans le respect des dispositions législatives que le parlementaire que je suis a approuvé et voté.

Comment voyez-vous les prochaines élections municipales ? Quel bilan allez-vous exposer à la population pour solliciter à nouveau sa confiance ? Pouvez-vous par exemple prendre l’engagement que le projet de tramway sur l’agglomération aura bien lieu, que la rénovation urbaine est bien sur les rails, ainsi que la construction du nouvel hôpital ?

Très sereinement. Fidèle à nos engagements de rassembler, de pacifier dans la concorde et la fraternité, deux Abymiens sur trois. Conformément à notre programme de 2008 nous présenterons notre bilan et notre projet de nouvelle mandature dans une démarche de démocratie participative à l’occasion des états généraux de la Force de Rassemblement Abymienne Pour le Progrès la (FRAPP), notre mouvement politique. Le projet Tram Excellence répond à l’appel à projets national qui le financera s’il est retenu dans la compétition entre 68 autres projets nationaux. Notre dossier est solide et bénéficie du soutien des principales institutions de la Guadeloupe. Il sera déposé le 15 septembre et nous serons fixés avant la fin de l’année 2013. Nous entamons les premières discussions avec l’État sur l’acte 2 de la rénovation urbaine. Cela veut dire que nous sommes sur les rails pour mener l’acte 1 de la RUZAB dans sa gare d’arrivée tout comme la sanctuarisation du financement de reconstruction du CHU à Perrin aux Abymes.

De gauche à droite, Jacques Bangou maire de Pointe-à-Pitre, Éric Jalton député-maire des Abymes, Ary Chalus député-maire de Baie-Mahault

 

LES ÉCOLIERS AU PAS À POINTE-À-PITRE

La réforme qui ouvre un débat

Lundi 9 septembre mi-journée à la salle du conseil de la mairie de Pointe-à-Pitre, associations, maire et équipe de conseillers étaient rassemblées pour signer les conventions qui ont marqué l’ouverture des ateliers périscolaires prévus pour les nouveaux rythmes scolaires. Moyennant une cotisation de 10 euros pour l’année, les enfants inscrits pourront choisir parmi la centaine d’activités proposées par les associations. Cette signature permet donc de lancer la période d’essai et d’observation des nouveaux rythmes que la municipalité a organisée dans l’urgence précise le maire Jacques Bangou.  » Pendant un an nous allons tester le système et l’enrichir grâce au suivi qui va se faire durant toute cette année « , indique-t-il. Avant, il n’y avait pas de regard sur les activités de l’enfant de la part des institutions, et des collaborations avec les associations permettront de répondre à ces enjeux.  » Des enjeux qui vont permettre à la municipalité d’amorcer une nouvelle phase de son organisation « , explique Jacques Bangou. L’amorceh d’une nouvelle organisa tion Cette réforme a levé plusieurs interrogations quant à l’accessibilité des activités et lieux culturels aux jeunes qu’ils sont censés inspirés.  » Nous nous sommes rendu compte que plusieurs services comme les musées et d’autres cadres étaient inaccessibles aux enfants car ils subissent les rythmes imposés par les cadres de la société « , argumente le locataire de la mairie. La réforme, avec sa phase d’observation, sera la première étape d’une réflexion sur une réorganisation des services municipaux :  » Nous regarderons comment rendre accessible la diversité culturelle à tous « , poursuit-il. Une première approche donc qui risque donc, sur le long terme, de bouleverser entièrement la société.

 

COURRIER PARLEMENTAIRE

Le logement c’est maintenant

Mardi s’est ouverte à l’Assemblée nationale la  » session extraordinaire  » ordinaire (c’est la troisième, alors ça n’a plus rien de très extraordinaire). Il n’y avait pas vraiment une atmosphère de rentrée, l’hémicycle était très vide – des Guadeloupéens, seul Ary Chalus était déjà arrivé. Il est vrai qu’ils vont avoir le temps de s’y coller, le premier texte en discussion étant le plus important de la V République… en volume ! Il va falloir sans doute attendre un peu pour savoir si ce projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové va vraiment nous faciliter la vie. Certes les rapporteurs de la commission Affaires économiques ont tenu le même discours que la ministre Cécile Duflot. En revanche on a cru sentir une certaine amertume chez le rapporteur de la commission Développement durable. Et l’opposition est aux taquets (enfin, pas encore mais ça va venir). D’ici qu’ils pondent un nombre record d’amendements alors qu’il y a déjà eu pour préparer cette loi une centaine d’auditions et plus de 1 000 amendements examinés !

Lourd à digérer

La session ordinaire s’ouvrira le 1er octobre. Au menu de l’Assemblée, le plat de résistance sera évidemment les retraites. Les sénateurs auront dans leurs assiettes l’indépendance de l’audiovisuel public, les métropoles, la programmation militaire 2014-2019, à leur tour l’accès au logement, à leur tour les retraites, et l’économie sociale et solidaire. Il y aura aussi quelques amuse-gueules budgétaires et financiers, et la collégialité de l’instruction (pas l’instruction publique, les juges d’instruction). De quoi avoir une indigestion.

Avalanche de questions matinales

Les sénateurs ont fait leur rentrée aux aurores et là on s’est dit que certains avaient besoin de se défouler après les vacances, parce qu’ils ont posé une foule de questions orales sur tout et n’importe quoi, des dépenses d’investissement pour les écoles à la compétitivité de la filière maïs doux en passant par l’avenir des CCI. Le projet de loi sur la consommation a ensuite été présenté par le juvénile Benoît Hamon. Le Guadeloupéen Félix Desplan, avec sa commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (mais où est-ce qu’ils vont chercher des noms pareils ?), recevait Manuel Valls pour parler cumul des mandats dans une ambiance très feutrée (pour l’instant).

2014 sera agricole ou ne sera pas

Tant qu’on y est : janvier 2014 verra arriver en première lecture devant l’Assemblée les projets de lois sur l’agriculture, l’artisanat, le commerce et les très petites entreprises. Le Sénat étudiera le texte sur la mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et la promotion de l’égalité des territoires – ça ronfle bien comme titre. C’est probablement pour préparer l’examen du projet de loi sur l’agriculture – ou alors ils y prennent goût, parce qu’il nous semble bien que ce n’est pas la première fois : la délégation sénatoriale aux outre-mer tient cette semaine une table ronde labourage et pâturage, on vous racontera.

Recherche : non, pas les lamentins, les Ultramarins

La délégation sénatoriale à l’outre-mer, encore elle, va recevoir chercheurs, universitaires etc. qui analysent au microscope les Ultramarins de l’hexagone. Ces éminents experts présenteront cette espèce bizarre et son comportement, pendant un colloque intitulé :  » L’audace ultramarine en hexagone : comment s’exprime-t-elle ? Comment s’incarne-t-elle ? « , organisé en partenariat avec la délégation interministérielle pour l’égalité des chances des Français d’outre-mer (si, ça existe). Cette fois c’est vraiment la rentrée !

 

ENTRE OUVERTURE ET AMBITION

Jean-Pierre Dupont invite aussi Cédric Cornet

Jean-Pierre Dupont

Quelques semaines après une annonce aux effets particulièrement travaillés lors du vin d’honneur de la fête municipale, le maire sortant Jean-Pierre Dupont s’exprime à nouveau sur sa candidature aux prochaines municipales tout en revenant sur les quelques points d’ombres qui parsèment sa mandature. Et c’est un discours qui se résume avec une phrase clé  » Je n’ai pas d’adversaires, mon seul vrai concurrent, c’est moi-même « , a affirmé le maire sortant. C’est avec une sérénité affichée qu’il aborde cette campagne électorale.  » J’estime que notre équipe a fait un travail remarquable « , commence l’élu,  » que ce soit concernant l’économie où nous nous tournons de plus en plus vers le tourisme, ou le social où nous œuvrons pour insérer les jeunes en difficulté mais aussi pour venir en aide aux personnes les plus fragiles, ou enfin pour donner la place qu’elles méritent aux associations et ancrer la ville dans son environnement culturel « . Un bilan plutôt satisfaisant, même si les questions du transport encore défaillant et de la pression foncière très importante sur la commune ternissent un peu l’ensemble.  » Nous continuons toutefois d’agir pour rétablir un service efficace concernant le transport car nous sommes conscients qu’il s’agit d’un enjeu majeur pour le développement économique « , continue-t-il.

Déjà en campagne

Et c’est pour se donner toutes les chances de parvenir à son but que Jean-Pierre Dupont s’est entouré de ses anciens rivaux Christian Thénard, du groupe ensemble pour le changement et Jean-Claude Christophe du Grag.  » Ce n’est pas une alliance politique, c’est plus une prise de conscience qu’ensemble nous ferons plus « , avance le maire sortant.  » D’ailleurs à ce titre, je tends une main à M. Cornet pour lui dire que s’il veut se rallier, il peut participer au projet d’une commune du Gosier plus forte « . En attendant, l’homme maintient encore le secret sur son programme, mais laisse échapper un indice :  » j’ai entre autres un très gros projet touristique, du jamais vu ici en Guadeloupe « , surenchérit Jean-Pierre Dupont. Totale confiance donc pour le maire sortant.

 

PORT-LOUIS

C’est la bouteille à encre

La commune administrée par Jean Barfleur est un véritable capharnaüm sur le plan politique. La génération Jano est comme désemparée devant l’absence de préparation à la succession du maire. Depuis longtemps, Jean Barfleur répète qu’il ne se représente pas aux prochaines municipales. Mais il n’a pas choisi clairement de successeur ni même établi les règles pour organiser cette succession. Selon certains, une ruse qui lui permettrait le moment venu d’apparaître comme l’ultime et seul recours. Sauf qu’il y a une dizaine de jours, les membres de l’équipe Barfleur se sont réunis en présence de leur mentor pour acter la décision de ce dernier de ne pas se présenter. La balle est désormais dans leur camp, et un petit groupe semble se constituer autour d’Alexina Meckel, Alain Moustache Mayéko, Bertrand Madassamy. Paul Chim, un moment tenté de faire cavalier seul se serait rallié à ce petit groupe qui essaie de s’organiser. Mais pour l’heure, rien n’est vraiment acté. Bref, le groupe historique de Jean Barfleur est en grande discussion. Pendant ce temps, le tandem Victor Arthin du parti communiste et Charly Edwige du PPDG ne se posent pas de question. Ils forment un attelage apparemment solide qui sera conduit par Victor Arthin. Quant à Marie Arthur, bien implantée à Pelletan, elle n’a pas encore choisi son camp. Mais elle ne restera pas inerte. Reste le leader du PPL Jean-Marie Hubert qui de toute évidence est prêt à livrer bataille. Même s’il sait qu’il risque d’avoir à affronter une coalition au second tour. Enfin Jacques Marie-Claire du PS est lui aussi sur la ligne de départ. Mais Dieu qu’il est difficile d’y voir clair. Vivement le début de la campagne !

 

PERSPECTIVES

Municipales 2014 : la stratégie « one-shot »

On aura beau chercher, on aura rarement vu une telle course à la constitution de liste « d’union » pour des élections municipales. Il va sans dire que cette stratégie ayant pour but de permettre de ramasser le maximum de voix dès le premier tour afin d’assurer une élection « en un seul coup » contrarie quelques ambitions de conseillers municipaux ou de candidats potentiels qui ne pourront que faire les frais de ces accords politiques inattendus ou inespérés. Et oui, on peut changer une équipe qui gagne… Si les alliances sont depuis toujours au cœur même du jeu politique, quitte à être parfois plutôt contre-nature ; elles révèlent cette fois un phénomène croissant et très actuel : l’évaporation lente mais sûre de la place des idéologies dans le débat électoral et politique mais aussi de la dilution des irréductibilités partisanes. Beaucoup plus que les solidarités militantes forgées par l’histoire et les batailles électorales passées, ce qui compte le plus aujourd’hui c’est la comptabilité des voix et des réseaux, la densité des soutiens financiers et la capitalisation des ralliements enregistrés à tel ou tel adversaire d’hier. Dans l’espoir que l’arrimage des ambitions puisse favoriser un rassemblement idyllique, les candidats tête de liste souhaitent manifestement opérer avec des ralliements soigneusement arrachés, une belle campagne de communication pré-électorale. Au delà de cet aspect, il y a aussi une autre réalité qui est celle que la politique est aussi l’art de gouverner pour tous mais surtout avec tous. Bien entendu, quel citoyen ne rêve de voir enfin nos élus effacer leurs différences et prendre à bras le corps les problèmes tels que le développement économique, la sécurité, le chômage, l’aide sociale. Oui mais voilà, rassembler pour une élection est une chose, exercer le pouvoir dans le rassemblement en est une autre. D’abord parce qu’une ville est gérée en réalité par un conseil municipal, et donc forcément avec les désaccords entre les uns et les autres et parfois même entre un maire et sa majorité (l’histoire récente d’un conseil municipal comme celui de la commune du Lamentin est là pour nous le rappeler). Ensuite parce que même en faisant fi des divergences idéologiques; l’unanimité n’est pas souhaitable en politique et très dangereuse en démocratie. Réussir à être élu au premier tour, dans une élection à fort enjeu populaire et stratégique comme le sont les municipales est à coup sûr un exploit enviable, mais cela peut engendrer des dynamiques futures de blocages en raison de certaines incohérences qui auront été camouflées à défaut d’être effacées. Il faudra alors plus que l’explication de l’opportunisme pour rendre des comptes à une population de plus en plus encline à sanctionner et à intervenir dans la vie publique.

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