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Le naufrage de François Fillon

En France, la politique est en miettes. Le mal ronge aussi bien la droite que la gauche. Une fois sur la sellette la droite n’a pas tardé comme l’a fait la gauche à exhiber au grand jour ses tiraillements. À peine François Fillon a-t-il demandé quinze jours, qu’on lui crache à la figure. Non lui a signifié par avance Georges Fenech. Le député est tétanisé par la peur de voir son camp perdre la présidentielle et lui, son mandat de député. Du coup, il faut comme dirait Jean-Luc Mélenchon dégager Fillon. Au plus vite. En tout cas avant qu’il ne soit trop tard. Cette affaire risque d’avoir des prolongements dévastateurs pendant longtemps au sein des Républicains. Elle risque aussi d’éloigner encore plus les citoyens de la politique. Au moins pendant quelques temps. La campagne électorale commence déjà à être escamotée. Élus, candidats, journalistes, et bien entendu les citoyens ne parlent plus de programmes, d’idées, de perspectives ou de valeurs mais de l’affaire. Triste campagne électorale.

Constater le caractère atroce du monde de la politique n’est pas nier la réalité. François Fillon est carbonisé. C’est la loi impitoyable du genre. Il est peut-être le seul à ne l’avoir pas encore compris. Il ne s’agit pas de savoir si l’emploi qu’a occupé son épouse est fictif ou non. La plupart des médias ont rappelé que cette pratique était courante chez les parlementaires. Surtout chez les députés-maires qui déclarent leur fils, leur épouse en tant qu’attaché(e) parlementaire et paient sur les finances de la mairie celui qui s’acquitte de la tâche d’attaché parlementaire. La messe de François Fillon est dite parce qu’il ne s’agit pas de savoir si l’embauche et la rétribution de sa femme sont légaux ou non. Aux yeux du smicard français, le procédé paraît mesquin. Il le parait d’autant plus que François Fillon s’était drapé du manteau de la vertu et qu’arc bouté dans cette posture, il croyait être fondé à demander aux Français des sacrifices. Y compris aux plus humbles. Depuis les articles du Canard enchaîné, certains ont vite traduit surtout aux plus humbles.

Rien ne dit qu’au final la droite ne gagnera cette élection présidentielle. La réalité devrait cependant ramener ses ténors à davantage d’humilité. En vertu de quoi peuvent-ils claironner indignés qu’ils ne se laisseront pas voler leur victoire. Quelle victoire ? Qui veut la leur voler ? Par quelle essence divine leur était-elle acquise d’avance ? Or, de cette élection c’est tout le contraire qu’il faut comprendre. Chaque jour emmenant son lot d’imprévus et de rebondissements, l’issue de cette campagne électorale s’annonce de plus en plus improbable. Nul ne sait sur quelle tête va tomber la prochaine tuile. Partant, les pronostics deviennent de plus en plus hasardeux. Les sondages ne sont plus d’aucun secours. Depuis quelques temps, ils sont régulièrement démentis par les résultats des élections. Plus de baromètre, sans boussole, les candidats ont tout de même réussi à saisir qu’il y avait dans l’air un courant porteur. Être dans le ton de cette campagne électorale, c’est être hors système. Tant pis si on ne l’est pas vraiment. Il faut absolument se déclarer comme tel. François Fillon lui aussi a tenté le coup. Il a cultivé le secret et a réussi à se fabriquer une image d’homme retiré, bourru mais humble. Et tout compte fait sympathique et… hors système. Il a dénoncé ceux qui y appartenaient. Sauf qu’aujourd’hui, tout indique qu’il est lui aussi un pur produit du système.

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