Le 21 octobre dernier, Nicolas Sarkozy franchissait les portes de la prison de la Santé à Paris, comme condamné débutant l’exécution d’une peine de cinq ans d’emprisonnement pour « association de malfaiteurs » dans le dossier du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.
Mais ce statut carcéral de « condamné » n’aura duré qu’un jour. En interjetant appel de sa condamnation le jour même de son incarcération, l’ancien chef de l’État a opéré une bascule juridique, et retrouvé immédiatement le statut de prévenu, présumé innocent, et le régime de la détention provisoire. C’est dans ce cadre que les juges d’appel de Paris ont dû trancher : fallait-il maintenir en prison cet homme désormais présumé innocent, et qui aura droit à un deuxième procès en mars 2026 ?
Leur réponse, détaillée dans un arrêt motivé, dresse le portrait d’un prévenu hors norme, capable d’« actionner différents services de l’État » tout en présentant des « garanties de représentation » suffisantes.
L’ancien président a été photographié à Paris (photo ci-dessus) quittant sa voiture en arrivant à son domicile après sa libération de prison. La cour d’appel de Paris a rendu lundi 10 novembre un arrêt motivé qui, tout en ordonnant la libération de Nicolas Sarkozy qui aura été incarcéré pendant 3 semaines, laisse présager un procès en appel sous très haute tension.
Les juges de l’île de la Cité ont d’abord reconnu les attaches solides de l’ancien chef de l’État, et estimé dans leur arrêt que « Nicolas Sarkozy, du fait de son enracinement en France tant par sa famille que par sa carrière et son patrimoine, ne présente pas le risque de se dérober à la justice française ». La cour a spécifiquement noté que « l’ex-président s’est toujours rendu aux convocations judiciaires » et qu’« il ne ressort ni des réquisitions du ministère public, ni de la motivation des premiers juges ayant conduit au prononcé d’une incarcération différée qu’il existerait un risque d’insuffisance de garanties de représentation ».
Un risque de pressions
C’est dans l’analyse des risques de pression que le ton se fait plus sévère. L’arrêt s’attarde particulièrement sur un échange intervenu en 2013 entre Nicolas Sarkozy et le directeur central du renseignement intérieur de l’époque, Patrick Calvar, au début de l’enquête sur le financement libyen. Les juges soulignent que « c’est le principe même de cette communication avec un responsable soumis au secret-défense qui interroge la cour ».
Par ailleurs, se référant explicitement à sa condamnation définitive dans l’affaire Bismuth (trafic d’influence impliquant un magistrat de la Cour de cassation), la cour estime que Nicolas Sarkozy « montre sa capacité à actionner différents services de l’État ».
De quoi justifier des mesures de contrôle judiciaire strictes, notamment une interdiction de contact « élargie » avec le ministre de la Justice Gérald Darmanin, les membres de son cabinet et tout cadre judiciaire susceptible de détenir des informations sur les procédures concernant l’ancien président.
Le délai de trois mois qui sépare Nicolas Sarkozy de son nouveau procès apparaît très court. Quelques heures après sa remise en liberté, Nicolas Sarkozy a déclaré sur les réseaux sociaux que son « énergie n’est tendue que vers le seul but de prouver mon innocence. La vérité triomphera ».
De son côté en qualifiant explicitement Nicolas Sarkozy comme disposant de cette « capacité à actionner différents services de l’État », la cour d’appel transmet un message sans ambiguïté au tribunal qui jugera l’affaire libyenne au fond : la nécessité d’une vigilance extrême face à un prévenu qui conserve des leviers d’influence exceptionnels au sein même de l’appareil d’État.
Avec AFP



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