Gourbeyre, son morne Dolé, les archives départementales à Bisdary et… un combat silencieux contre un fléau moderne : les dépôts sauvages d’encombrants et ordures ménagères. « Gourbeyre s’est fixé un objectif 0 déchet », déclare déterminé Grégory Gaspaldy, responsable adjoint au service technique de la ville. Ce vendredi 1er mars marque la fin d’une opération de nettoyage intense démarré au lendemain de mercredi des Cendres, et qui a duré quinze jours.
Le territoire communal est ponctué de « points chauds » tels que Champ Fleury ou la résidence des Monbins. C’est le point chaud du quartier Vieux Chemin qui a été traité le 27 février. Grégory Gaspaldy confie avoir « le dossier en main » et observe que « ça bouge ».
Jadis, la gestion de cette problématique incombait à la communauté d’agglomération du sud Basse-Terre (CASBT), qui se recentre désormais sur des services de ramassage personnalisés, sur demande des particuliers. La mairie, quant à elle, doit redoubler d’efforts, jouant jusqu’à aujourd’hui sur la double corde de la gestion opérationnelle et de la communication persuasive.
Un coût de 41 000 €
Les initiatives municipales incluent le déplacement des bornes d’apports volontaires à Grande-Savane à côté du restaurant, espérant que la proximité avec les commerces à forte fréquentation But, Super U incite au civisme. Il y a aussi le lancement d’opérations de ramassages ciblés, dont le coût s’élève à 22 000 €. « Après le ramassage, le service technique pose des barrières, met en place des fleurissements », précise le cadre territorial. Il annonce également l’arrivée prochaine de caméras mobiles, pour un budget de 19 000 € (14 000 € pour les équipements et 5 000 € pour l’abonnement au service de vidéosurveillance). Et la mise à disposition de bennes mobile dans tous les quartiers.
De fait, les dépôts sauvages ne résultent pas d’une seule cause mais d’un ensemble de facteurs incluant le comportement individuel, les systèmes de gestion des déchets inadéquats, et parfois un manque d’infrastructures appropriées. Le coût total de cette mission 0 déchet dépasse les 41 000 € pris entièrement dans le budget de la communauté.
Côté communication, la ville joue sur deux tableaux : la dissuasion, avec des mises en garde contre le dépôt sauvage, passible d’amendes et de confiscation de véhicule, et l’appel au civisme, avec des affiches au message clair : « Stop aux dépôts sauvages sur la voie publique. Ma ville n’est pas ma poubelle ! ». Malgré cela, les résultats restent décevants, avec à peine deux amendes de 150 € dressées par la police et non payées par les contrevenants, selon les informations recueillies en mairie. L’application des amendes, rarement effectuée et souvent non suivie de paiements, révèle une faille dans le système de dissuasion.
Des témoignages qui en disent long
Monsieur Gaspaldy partage une anecdote révélatrice : « J’ai personnellement été confronté à un contrevenant. L’homme d’une trentaine d’années semblait être un professionnel des espaces verts pour particuliers. Pris la main dans le sac en train d’abandonner ses déchets verts, et rappelé à l’ordre, il m’a injurié et menacé, presque à en venir aux mains », déplore-t-il, soulignant que les pollueurs sont souvent des professionnels, notamment des entreprises de climatisation et de plomberie. « On retrouve des masses de climatiseurs et de sanitaires », précise-t-il. Il pointe également du doigt les particuliers qui abandonnent encombrants, matelas usagers, meubles, et déchets ménagers.
Ce sentiment de dégradation du cadre de vie est partagé par Patricia, quinquagénaire, résidente de Petit-Bourg, qui regrette le temps où les déchets étaient gardés à domicile. « Je ne comprends pas, quand j’étais petite, les gens gardaient leurs déchets chez eux et ne les sortaient que la veille des ramassages. Aujourd’hui, ils ne se passent pas un jour sans que des dépôts ne s’amoncellent. À peine nettoyés, les lieux sont recolonisés, c’est infernal », déplore-t-elle. Autre commune, même témoignage, à Baie-Mahault route de Plaisance, un jardinier pris en train de déposer les déchets de sa prestation se justifie d’un benoît « c’est la propriétaire qui me dit de mettre les déchets au bord du chemin ».
Vers une solution durable ?
Interrogé sur les causes connues de ce fléau qui dépasse les frontières de Gourbeyre pour toucher l’ensemble de la Guadeloupe, Grégory Gaspaldy attribue cette détérioration à un oubli progressif des principes essentiels qui étaient autrefois inculqués. Il se remémore avec nostalgie le slogan « Une Guadeloupe propre et belle », emblématique de son enfance, avant de constater avec regret que les mentalités ont évolué. « Les choses se sont dégradées », admet-il.
Mais il reste motivé par un désir de redressement, inspiré par son « vécu dans des pays anglais où il n’y a pas ce problème de dépôts sauvages ». C’est d’ailleurs cette expérience qui l’a incité à prendre le problème à bras-le-corps. Gourbeyre a programmé l’installation de caméras de vidéosurveillance mobiles chasseuses de pollueurs. Une idée inspirée par la ville de Petit-Bourg. « Sans pénalisation, on n’y arrivera pas », affirme le responsable technique.
Même les panneaux d’information installés ont été rapidement détruits. Face à cette forte incivilité adulte, il se tourne vers les enfants et envisage aussi de collaborer avec la police de l’environnement pour lancer des programmes d’éducation environnementale destinés aux plus jeunes.
Au-delà des efforts de nettoyage et de surveillance, la mairie de Gourbeyre prévoit aussi de revisiter sa stratégie de communication. Philippe François, internaute, suggère à la municipalité de « communiquer massivement sur l’obligation de déposer les encombrants à la déchetterie de Baillif. C’est si timide et confidentiel ». Un commentaire que le responsable adjoint du service technique Grégory Gaspaldy, accueille favorablement en assurant que le service communication sera sollicité dans ce sens. Les messages communaux mettront l’accent sur la gratuité de l’accès à la déchetterie de Baillif. Ce changement de cap dans la communication avec la mise en avant de la gratuité et l’amélioration de l’accessibilité des déchetteries pourrait jouer un rôle crucial dans la modification des comportements.
Entre efforts de nettoyage, stratégies de communication et initiatives de sensibilisation, Gourbeyre espère retrouver sa propreté et sa beauté. Réagissant à l’annonce du nettoyage du point chaud à l’entrée du nouveau cimetière au Vieux-Chemin, avec pose de talus, un résident David Budnyk félicite : « Enfin, cela devenait une vraie déchetterie, bravo aux équipes, il serait intéressant de mettre la photo avant pour que la population prenne bien conscience de la situation, on revient de loin. »


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