Laurella Rinçon, directrice générale du Mémorial acte (Macte) a été à nouveau révoquée le 30 août par Ary Chalus, président du conseil d’administration du centre caribéen d’expression et de mémoire de la traite et de l’esclavage. Cette fois, le président de Région avait obtenu le 4 juillet l’aval du conseil d’administration auquel lui-même, Gersiane Bondot-Galas, Jean-Louis Francisque, Camille Pelage, Géraldine Naigre, Jean-Marie Hubert, Valérie Samuel-Césarus, Philippe Dezac, Jean-Marie Pilli, David Moutout, Sylvie Vanoukia, Sylvie Dagonia, Harry Durimel, Michel Mado avaient participé.
Deliberation-conseil-administration-Memorial-acte-revocation-Laurella-Rincon-4-juillet-2023Les administrateurs se sont prononcés en faveur de la révocation de Laurella Rinçon par 15 voix pour et 1 voix contre. Le maire de Pointe-à-Pitre, Harry Durimel a voté contre, après avoir expliqué au président de Région sa réticence dans une lettre datée du 4 juillet. Il l’y invitait « à créer une commission ad hoc pour tenter une médiation et une mise à plat du dossier ».
Laurella Rinçon accusée de favoritisme
Ce limogeage intervient cette fois « pour faute grave ». Ary Chalus reproche à Laurella Rinçon d’avoir fait travailler plusieurs entreprises pour la sécurité et le nettoyage de l’établissement, en dehors du cadre légal de la procédure des marchés publics. Sur ce même motif, une plainte lancée par Ary Chalus lui-même a valu à la directrice générale du Macte d’être en garde à vue pendant toute la journée du mercredi 12 juillet. Si cette plainte prospère, Laurella Rinçon pourrait être amenée à comparaître en correctionnelle pour favoritisme ou détournement de fonds publics.
Depuis son éviction, Laurella Rinçon s’est murée dans le silence et n’a donné aucune indication quant à ses intentions. Selon nos informations, les faits sur lesquels serait fondée la faute grave étaient observables et connus d’Ary Chalus lui-même. Laurella Rinçon a été nommée à la tête du Macte en octobre 2019. Et les marchés publics de gardiennage et nettoyage préexistaient, relevant du fonctionnement courant des lieux. Jusqu’à sa transformation en Établissement public de coopération culturelle en mars 2019, le Macte était géré par la Sem patrimoniale, société d’économie mixte dont la Région est actionnaire.
Ary Chalus, dénonciateur sur la tard
Selon plusieurs sources, à sa prise de fonction en octobre 2019, la directrice générale aurait demandé à la Sem patrimoniale et au conseil régional de lancer les procédures de renouvellement de ces marchés publics alors qu’ils arrivaient à échéance. Ces deux instances ont refusé. Laurella Rinçon aurait opté pour la prolongation des prestations de sécurité et de nettoyage avec les mêmes entreprises trouvées en place, pensant permettre la continuité de services, et éviter la fermeture du Macte.
Laurella Rinçon aurait aussi été mise en difficulté par la période de circonstances exceptionnelles créées par le covid-19 en 2020 et 2021 et la crise de gouvernance entre le conseil d’administration et la direction générale depuis 2020. Lesquelles circonstances exceptionnelles plaidaient en faveur d’une prolongation des prestations hors procédures. À nouveau saisi par Laurella Rinçon en février et octobre 2022 de la question de ces marchés, le conseil d’administration présidé par Ary Chalus n’a pas donné suite.
Le délit de favoritisme se prescrit par 3 ans à compter du jour où les faits ont pu être constatés dans des conditions permettant la poursuite de l’infraction. Laurella Rinçon avait informé Ary Chalus en qualité d’exécutif régional, de la fin imminente de ces marchés. Ary Chalus avait connaissance du fait que le Macte continuait d’être nettoyé et gardienné.
Entre 2019 et 2023, il n’a jamais cessé de fréquenter les lieux. Il est devenu président du conseil d’administration le 13 août 2021. Entre le 11 novembre et le 4 décembre 2022, le Macte était l’épicentre des arrivées et du village de la Route du rhum organisée sous l’égide de la Région. Président de Région et président du Macte, il était en mesure de constater les faits qu’il ne dénonce qu’aujourd’hui, ce qui relève d’un manquement d’Ary Chalus lui-même.
Autre Code, même imbroglio. Le Code du travail dispose « qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, sauf si ce fait fautif a donné lieu à l’exercice de poursuites pénales. » La plainte d’Ary Chalus tombe à pic pour justifier la sanction d’une faute qui serait autrement prescrite. Le site d’information Blast va même écrire dans un article publié le 17 juillet que « l’affaire semble avoir été montée de toutes pièces pour satisfaire l’ego d’un Chalus qui n’accepte pas qu’on lui résiste. » Il sera intéressant de voir comment les tribunaux apprécieront le caractère tardif et à propos de cette dénonciation, et comment cette affaire sera tranchée.
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