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Nos élus ont déserté Bouillante

Le centre géothermique de Bouillante sera sous peu propriété d’un groupe industriel américain dénommé Ormat. Les dernières formalités à remplir par l’acquéreur s’apparentent à des broutilles et peuvent être considérées comme accessoires. Bref, pendant que quelques citoyens continuent à s’indigner du sort fait à ce patrimoine guadeloupéen, il y a longtemps que la messe est dite. Et comme c’est souvent le cas, tout se passe à Paris ou ailleurs. En tout cas loin d’ici. C’est simple, sur ce sujet, notre avis a été jugé inutile, si ce n’est nuisible. C’est bien connu, venus d’ailleurs, les jugements et les décisions qui nous concernent au premier chef sont meilleurs que ceux que nous pourrions nous-mêmes édicter. Dans cette affaire, l’État qui depuis sa création, portait haut cette structure, s’en est débarrassée comme d’une patate chaude. EDF qui jusque-là s’était toujours comportée en Guadeloupe en entreprise citoyenne, sur les ordres d’Henri Proglio s’est, elle aussi, défaussée. Ils avaient pourtant belle allure tous ces discours qui vantaient l’incroyable ressource géothermique de Bouillante. Quelques élus nationaux de passage, grisés sans doute par la douceur des alizés, se sont laissés aller à des jugements dithyrambiques sur Bouillante.

À les croire, la Guadeloupe aurait été à l’époque une grande avant-gardiste au niveau de la production d’électricité géothermique. Nous étions tantôt jaugés à l’aune de la Caraïbe, tantôt mis sur un piédestal mondial. Nous étions comment dire… des pionniers. La belle affaire ! Le mot a été plusieurs fois prononcé. Si tout cela n’était pas que balivernes et flagorneries politiciennes, comment expliquer que le cours de la géothermie se soit déprécié au point que ceux qui l’ont vantée veuillent s’en débarrasser au plus vite ? Admettons qu’au final, la stratégie de l’État ne soit plus le développement et la valorisation et de l’énergie propre. Admettons aussi que l’heure ne soit plus aux caresses dans le dos. Les affaires, par les temps qui courent dit-on, priment sur tout le reste. Soit. Est-ce que ce qui peut paraître une opportunité vue depuis Paris, l’est forcément de l’avis de ceux qui vivent ici ? Pourquoi diable avons-nous été écartés des discussions ? Pourquoi avoir organisé des messes basses sur cette transaction ? Pourquoi n’avons-nous pas eu notre mot à dire sur cette question qui concerne davantage le Bouillantais que l’habitant de Paris ou du Poitou-Charentes, qui soit dit en passant, n’en a strictement rien à faire. Nous n’étions même pas dignes d’être consultés ?

Et puis la question qui tue : où sont passés nos élus ? Eux si prompts à monter au créneau sur des vétilles, eux qui savent si bien s’invectiver et lancer des querelles stériles. Ils observent sur cette affaire un silence assourdissant. Il y a peut-être de bonnes raisons de se débarrasser de cette centrale. Nous pourrions peut-être les connaître. Reste une bande de saints qui prêchent dans le désert. Ils auront du mal à trouver le salut. Leur combat et leurs convictions sont nobles et courageux. Il est cependant perdu d’avance. La construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes a été reportée sine die en attendant un référendum. C’est le résultat d’une forte mobilisation des citoyens. Ils continuent à être vigilants. Combien de fois les Guadeloupéens se sont-ils rassemblés de façon massive autour du devenir de l’usine géothermique de Bouillante ? Pas une seule. Le sujet s’invite très rarement dans les conversations. De fait, nous nous en moquons royalement. C’est peut-être la raison pour laquelle les élus n’ont pas jusqu’ici levé le petit doigt. Le feront-ils jamais ? Électoralement l’affaire n’est pas juteuse.

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