VICTORIN LUREL
Avril 2014, Victorin Lurel rentre en Guadeloupe après 22 mois passés au gouvernement en tant que ministre des outre-mer. C’est l’heure du bilan et des perspectives pour le leader socialiste plus décidé que jamais à ne rien céder dans le combat politique en Guadeloupe.
Victorin Lurel : Sans céder au triomphalisme, je suis assez content de mon passage au ministère des outre-mer. J’ai mérité de la confiance du président de la République. Je n’ai jamais perdu un arbitrage. Le Premier ministre a toujours arbitré en faveur des mesures que je proposais. Je rappelle que nous avons obtenu un ministère de plein exercice directement rattaché au Premier ministre, la nomination de trois ressortissants des outre-mer au gouvernement. C’est symbolique mais c’est important. Je suis satisfait aussi du retour de l’État dans les outre-mer. Car il y avait eu un désengagement total. Le concept de développement endogène était un écran de fumée qui voulait dire débrouillez-vous ! Nous avons appliqué aussi une méthode en établissant un lien de confiance avec les élus, la concertation avec le milieu économique. Je suis allé sur le terrain avec le président de la République et avec le Premier ministre. Nous avons pris des mesures immédiates pour sauver des territoires en faillite : la Polynésie, Saint-Martin, Wallis et Futuna, Mayotte. Le budget 2013 a augmenté de 4 % celui de 2014 de 1 %. Nous avons sauvegardé et sanctuarisé la ligne budgétaire unique (LBU) dédié au logement, dégagé 500 millions de fonds exceptionnels d’investissement dans une période difficile. Nous avons obtenu 9 500 emplois d’avenir pour l’outre-mer ce qui représente 10 % de l’enveloppe nationale alors que nous ne représentons pas 10 % de la population française. Nous avons obtenu des créations de postes dans l’éducation nationale…
Le Courrier de Guadeloupe : Venons-en aux mesures phares de votre ministère…
V.L. : C’est indéniablement la loi de régulation économique outre-mer qui permet de lutter contre la vie chère, s’attaque aux monopoles et favorise la concurrence, réglemente les marchés de gros, interdit les exclusivités de marque comme c’est la règle en Europe et met en place le bouclier qualité/prix. Cette loi a permis de rendre du pouvoir d’achat aux populations, de préserver l’essentiel de la défiscalisation, de mettre en place le crédit d’impôts, de déployer le financement des entreprises avec la mise en place de la banque publique d’investissement (BPI). Nous avons également réformé le mode de fixation du prix du carburant. Nous avons initié aussi une loi sur la qualité de l’offre alimentaire qui permet aux producteurs locaux d’accéder dans des conditions favorables aux marchés publics (circuit court, fraîcheur, moins de CO2) une façon de donner la priorité à la production locale. Je signale en passant que toutes les lois que j’ai proposées au Parlement ont été votées sans opposition. Nous avons intégré le bouclier qualité/prix dans la production locale. Et je peux vous dire que les Réunionnais savent s’en servir. Nous avons fait baisser les prix de la téléphonie mobile. Le roaming sera supprimé d’ici décembre 2015. Nous avons fait baisser le prix du fret maritime (-10 %). Et je rends ici hommage à CMA CGM qui a bien compris l’enjeu. Reste maintenant à répercuter la baisse des coûts jusqu’au consommateur. Mais je serai vigilant là-dessus. Le dispositif Bino a été prolongé jusqu’à avril 2014. Après c’est le jeu du dialogue social. Nous avons également fait voter une loi organique sur la Nouvelle Calédonie appelée loi de décolonisation. Il y aura une élection provinciale d’ici mai 2014. Cette assemblée devra choisir une date pour un référendum d’ici 2018. Si l’assemblée ne le fait pas l’État le fera. Nous avons fait également voter une loi sur les tarifs bancaires dans les collectivités outre-mer.
LCG : Vous avez réussi à mettre en place de nouvelles règles pour le calcul du prix des carburants outre-mer mais la SARA qui fait plus de commerce que de raffinage n’est-elle pas condamnée à terme ?
V.L. : Vous avez raison. Total veut sauvegarder ses profits et ne veut pas investir, alors qu’en investissant l’entreprise gagnerait à terme plus d’argent. S’il n’y a pas d’investissement, la SARA peut disparaître. Ils peuvent essayer de contourner la loi et amplifier l’importation depuis Trinidad. Mais de toute façon le modèle actuel est obsolète. Dans les mesures prises nous ouvrons les cuves de la SARA qui ont été financées en défiscalisation – donc avec de l’argent public — à tous les importateurs. La SARA devra louer ses cuves avec des facilités essentielles aux autres importateurs. C’est l’autorité de la concurrence qui va réguler tout cela. C’est ce schéma qui les a déchaînés contre moi. Mais si la SARA ne se modernise pas pour raffiner suffisamment pour les trois départements, je vous promets que l’entreprise est condamnée et devra dans un premier temps accepter la concurrence de nouveaux importateurs qui utiliseront leurs cuves. Par ailleurs je suis content d’avoir mis fin à une situation de blocage et de prise d’otage de la population pour du carburant. Désormais grève ou pas grève 25 % des stations devront rester ouvertes à toute la population sans compter ce que le préfet peut réquisitionner. Et je peux vous dire que sur le volet du carburant, je continuerai mon travail.
LCG : La France est dans une situation économique difficile, comment les outre-mer prendront-ils part au pacte de responsabilité ?
V.L. : Il y aura une déclinaison outre-mer. Nous sommes dans la République. Nous participerons au redressement de la France. Mais nous avons dans le même temps prévu un vrai bing bang outre-mer. Le ministère des outre-mer disposera de 2 milliards d’euros, de plus il sera dégagé 4 milliards au niveau fiscal (ndlr : via la défiscalisation), et l’effort budgétaire de l’État se chiffrera à 13 milliards d’euros (ndlr : tous ministères confondus). De quoi vous dis-je organiser un vrai bing bang pour les outre-mer.
LCG : On vous a entendu concernant les élections municipales, vous estimez que le GUSR n’est pas loyal ?
V.L. : je vais plus loin que cela. Je dis qu’il y a un vrai problème de morale politique qu’il faut clarifier. Cela dit, s’il n’y a pas de liste commune à gauche pour les régionales ce ne sera pas une catastrophe. Ce que je crains et que je dénoncerai systématiquement c’est une étrange coalition de la droite avec une certaine gauche dans un processus anti PS ou anti Lurel sous couvert de ni droite ni gauche donc tout est possible ou sous couvert d’évolution institutionnelle. Mais vous savez, je suis habitué. Nous au PS, nous avons toujours été unitaires pour deux.
LCG : On parle de plus en plus de la suppression du Département. Qu’en est-il et êtes-vous toujours hostile à une évolution statutaire ?
V.L. : La suppression du Département ce ne sera pas l’affaire de cette mandature qui se termine en 2017. Par ailleurs, je tiens à affirmer que je ne suis nullement opposé à une collectivité unique, à condition qu’on dise aux Guadeloupéens ce qu’on veut faire vraiment. Si c’est une simple réorganisation de la gouvernance administrative qui ne répondra pas aux problèmes des Guadeloupéens je dis non. Il faut un vrai projet et dire aux Guadeloupéens où on veut les mener. L’instrument institutionnel ne peut être qu’un outil au service d’un projet qui fixe le cap et une véritable ambition pour la Guadeloupe.
Lurel, le retour
Josette Borel Lincertin démissionne de la présidence de la Région conformément aux engagements qu’elle avait pris. Le 12 avril interviendra au conseil régional un vote qui devrait reconduire Victorin Lurel au poste de président de Région. L’ancien ministre des outre-mer entre donc directement dans le vif du sujet. Bien décidé à en découdre.
JACQUES BANGOU
» Nous avons des outils qui nous permettent d’anticiper les politiques du gouvernement en matière de décentralisation «
Le Courrier de Guadeloupe : Les communautés d’agglomération restent un concept flou que l’opinion publique a encore du mal à appréhender. Concrètement, dans la pratique qu’est-ce que ça change dans le quotidien des administrés ?
Jacques Bangou : » Cap excellence » a été actif dans les domaines de compétences qui lui ont été attribuées par les villes membres. Celles-ci ont, au tout début, été prudentes, voire timorées et notre coefficient de transfert reste faible. Mais dans tous les domaines transférés nous avons tâché d’être exemplaires :
Pour l’eau dont on mesure aujourd’hui l’importance, nous avons investi régulièrement et fortement dans le remplacement des canalisations ; Nous avons fait un ouvrage remarquable qui relie Miquel à Baimbridge et qui nous fait économiser, à nous et à la Guadeloupe, 1,5 million de m3 d’eau potable/an ; Nous avons lancé les études pour doubler la capacité de Miquel et renforcer cette usine de traitement de l’eau ; Nous avons lancé le plus grand marché de traitement d’eaux usées pour une nouvelle usine à la Pointe-à-Donne. Nous avons réuni les deux parties des Abymes (dans les grands fonds) qui étaient gérées par deux opérateurs différents, égalisé le prix de l’eau sur ces secteurs et diminué le prix de l’eau de plus de 40 % pour 80 % des familles de l’agglomération.
Nous avons radicalement transformé le secteur urbain transféré à l’assainissement (axe Ignace-Miquel) et nous faisons de même en ce moment à Louisy Mathieu et au carénage ; Nous avons lancé un éco-quartier à l’assainissement. Nous sommes en cours de réhabilitation/reconstruction de toutes les structures culturelles transférées : Sonis, Centre des Arts, Renaissance, Bibliothèques de quartier.
Nous avons piloté avec l’État le contrat urbain de cohésion sociale et nous accompagnons chaque année plus de 120 projets associatifs qui relèvent de la cohésion sociale pour plus de 2,4 millions d’euros.
Mais au-delà de tout cela et ce qui nous permet d’appréhender l’avenir avec sérénité, ce sont tous les outils que nous avons mis en place pour maîtriser les secteurs de développement :
– Programme Local d’Habitat pour zoner les différents habitats et éviter les ghettoïsations pour riches ou pour pauvres et garder des couloirs verts,
– Schéma directeur du développement économique pour optimiser tout le potentiel du territoire en complémentarité et non plus en concurrence,
– Plan de Déplacement Urbain pour le transport (en liaison avec le Syndicat Mixte des Transports) avec un volet bus, taxis mais aussi un volet maritime et bien sûr le Tram,
– Mise en place d’un schéma de développement économique par la culture,
– Agenda 21 avec un plan climat énergie territorial, des mesures concrètes pour améliorer le bilan Carbonne de » Cap « ,
– Schéma des besoins sociaux au plus près de chaque famille avec analyse par groupes d’emplois : famille, petite enfance, pauvreté, précarité, logement, vieillissement…
– Gestion des eaux pluviales et des risques d’inondation avec station météo de proximité sur l’agglo et systèmes d’alertes.
– Schéma de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et des métiers du futur liés aux grands chantiers sur l’agglomération : CHU, Grand projet de port, RU, Tram, STEP…
– Et bien entendu la poursuite et l’extension de la rénovation urbaine avec un volet social et un volet transport incontournable. Ce sont ces outils qui nous permettent d’être opérationnels aujourd’hui dans tous les secteurs et basculer dans le faire en appliquant les choix politiques des conseils communautaires à venir, prêts à accueillir de nouvelles compétences et à anticiper les décisions gouvernementales en matière de décentralisation et de politique de la ville.
LCG : En votre qualité d’élu de Guadeloupe en dehors de vos projets pour votre ville et pour votre communauté d’agglomération, quelle vision future avez-vous de la Guadeloupe ? Quel visage aimeriez-vous qu’elle prenne dans six ans ? «
J-B : Dans moins de dix ans les Guadeloupéens auront à leur service trois structures qui rythmeront leur quotidien : leur ville d’origine lieu incontournable de la première proximité et de construction identitaire, l’agglomération lieu de travail, de déplacement, de loisirs, bref lieu de vie, et la Région ou (je l’appelle de mes vœux) une collectivité unique qui, avec des compétences décentralisées ou des capacités décisionnelles territorialisées, coordonnera les différentes intercommunalités, assurera l’égalité des territoires, conduira les politiques structurelles du pays en matière d’énergie, d’environnement, de gros équipements dans une relation décomplexée avec la République.
FIN D’UNE ÈRE
Le dimanche noir de José Toribio
La confiance que portait José Toribio à son électorat n’aura pas suffi à enrayer la montée de Jocelyn Sapotille. Au second tour, le socialiste confirme son avance et met fin à l’ère Toribio.
47.08 % contre 52.92 % avec un écart de près de 600 voix. Pour le clan Toribio le constat est affligeant. Alors que les deux hommes se tenaient à 124 voix d’écart à la fin du premier tour, au second, Jocelyn Sapotille fait clairement pencher la balance de son côté en ralliant la majorité des voix de Juliard et Merabli et en puisant dans le réservoir d’abstentionnistes. Dimanche soir, l’arrivée de chaque urne n’a fait qu’enfoncer le clou. Chez les pro-Toribio on accuse le coup, et on amorce la remise en question. « Nous n’avons pas su mener une campagne de proximité, c’est le peuple qui fait une élection municipale et clairement, pour ce deuxième tour, il est du côté du concurrent. Peut-être avons-nous fait une erreur, peut-être nous sommes nous trompés d’élection. » analyse dépité un homme près du bureau de vote 2. À l’annonce de la victoire de Jocelyn Sapotille, alors que la foule électrisée se bouscule à l’arrivée de l’élu, quelques lamentinois qui ont voté en faveur de Sapotille regardent de loin la liesse et débriefent. » J’aime bien José Toribio, mais il faut avouer qu’il a pêché par ego et orgueil. Il n’a pas su faire les choix qu’il faut et surtout il n’a pas su choisir ses soutiens. Pourquoi appeler Michaux-Chevry à venir le soutenir ? Ce ne sont pas des élections législatives ou cantonales, ce sont des municipales. Les municipales se font avec le peuple et personne d’autre. » commente un citoyen. « Sans compter la liste ! Pas un seul représentant du peuple, que des membres de la bourgeoisie lamentinoise, le peuple ne pouvait pas adhérer. Ces choix te font gagner deux voix mais t’en font perdre deux cent. » continue son comparse. Pour autant, les lamentinois ne perdent pas de vue Jocelyn Sapotille et se tiennent prêts au vote sanction. » Là Jocelyn Sapotille a tout : les assiettes, les fourchettes, les couteaux, il ne reste plus qu’à voir comment il va mener le Lamentin. Si avec son réseau et sa place privilégiée au Conseil Régional, la ville ne bouge pas, alors, elle ne bougera plus jamais ! Il parle de la mise en place d’un autre système. Je ne demande qu’à voir ce qu’il propose » râle un autre membre de la petite assemblée.
Lamentin libérée !
Du côté des militants de Jocelyn Sapotille, l’émotion est palpable. Présent devant le bureau centralisateur à 20 h 00, un homme à la chair de poule dès que le nom de son candidat sort victorieux d’une urne. À 20 h 15, ses contacts sont formels, Sapotille sera élu maire du Lamentin. Il exulte. » Le Lamentin retrouve enfin sa dignité. Après 71 ans je vois enfin s’achever l’ère des Toribio. Je ne pourrai pas être plus heureux ! » L’homme en a presque les larmes aux yeux. » José Toribio comme son père ont été des maires tyranniques. Déjà le père était quelqu’un qui n’hésitait pas à lever la main si jamais on osait s’opposer à lui. Je l’ai vu de mes yeux ! Et le fils a suivi la même voie » Dans tous les cas, autant politiquement, qu’humainement, le mandat Toribio aura été celui de la division. Avec un certain clientélisme dans le traitement de la carrière des employés municipaux. » Ceux qui n’étaient pas dans son camp ont été traités de fainéants et de voleurs ! Par contre pour ceux acquis à sa cause ont eu droit à toutes sortes de promotions et d’avancements de carrière ? « . Un constat partagé par certains militants du maire sortant. « Quand on se permet de diviser ses employés municipaux, c’est qu’on n’a rien compris aux élections. »
BOUILLANTE
Thierry Abelly : » La Guadeloupe a besoin que les élus fassent bouger les lignes «
Thierry Abelly : Sur le plan politique, je ne suis pas un homme de parti, ni de droite ni de gauche, je travaille avec les gens qui ont des idées pour leur territoire et qui ont l’ambition et la capacité de les mettre en œuvre. Je me définis comme un humaniste, je crois en la valeur des hommes et des projets plutôt qu’à une notion de parti. J’ai installé mon conseil municipal dimanche 6 avril dernier, je vais réunir l’ensemble de mes collègues et discuter avec les deux clans qui semblent se dégager dans la communauté d’agglomération du Sud Basse-Terre, et en fonction des propositions je verrai de quel côté je me pencherai. Je n’oublie pas tout de même que le développement de la zone relève d’enjeux importants parmi lesquels le transport public qui n’est pas efficient et qui devrait soulager la population qui n’a pas les moyens d’assumer les frais d’un véhicule. Il ne faut pas non plus oublier que la Guadeloupe est une île et que l’on ne pourra pas céder au tout voiture pendant bien longtemps. L’assainissement et l’eau sont aussi des problématiques importantes, ainsi que les stations d’épuration. Autant de chantiers qu’il est urgent de mener à bien.
Le Courrier de Guadeloupe : En votre qualité d’élu, et au-delà de la politique de votre commune, quelle vision de la Guadeloupe avez-vous sur les six prochaines années ?
T.A. : Je pense que la Guadeloupe a énormément d’atouts mais a besoin que les élus en place essaient de faire bouger les lignes. Souvent, les choses n’avancent pas car on reste dans un confort sans jamais oser. Il faut sortir des schémas qui ont vingt voire trente ans. Il faut vraiment mettre l’accent sur notre jeunesse qui est malheureusement devenue un fonds de commerce pour de nombreux élus, mais qui reste aussi un de nos chantiers prioritaires et tout devrait être fait pour lui permettre de retrouver confiance en l’avenir. Les forces vives doivent rentrer mais il faut devenir un territoire attractif, pas seulement dans les mots, dans les volontés, mais aussi dans la réalité. Il y a un nombre important de jeunes diplômés qui arrivent et qui ne trouvent pas d’emploi. Dans ces conditions je comprends que ceux qui sont à l’extérieur n’aient pas envie de rentrer. Oui, pour un retour, mais il faut aussi proposer autre chose. Il faut occuper les jeunes, en termes d’emploi et de politique culturelle et sportive, dépasser le parler pour s’inscrire dans l’action, c’est fondamental. Il faut un comité de réflexion, mais qui fasse vraiment sens.
LCG : Les politiques volontaristes en faveur de l’écologie se multiplient depuis quelques années, pensez-vous que la Guadeloupe a les moyens de prendre le tournant de l’économie verte ?
T.A. : C’est très porteur, un territoire ne peut être dépendant des énergies fossiles, à la fois économiquement et écologiquement. Nous avons la chance d’être baignées d’énergies renouvelables et nous devons l’exploiter pour mettre en avant notre savoir-faire et mettre un pied décidé dans l’économie verte. Si on prend l’exemple de Bouillante pour la géothermie, nous pouvons nous positionner en fer de lance dans la Caraïbe car de nombreux projets se montent dans la zone en faveur de la géothermie. C’est un rendez-vous qui ne doit pas être manqué. Et pour ce faire, il faut un accompagnement fort. Mais il faut aussi, pour que ces énergies soient acceptées, que la population guadeloupéenne y trouve son compte. Il n’est pas normal qu’on puise des ressources dans le sol de Bouillante et que la population n’ait aucunes retombées. Je me bats depuis des années, pour une redevance sur la géothermie et ce n’est toujours pas acté. Une récente discussion avec l’ex ministre des outre-mer, Victorin Lurel laissait entendre qu’on devrait avancer cette année ou l’année prochaine, j’espère qu’on y arrivera.
PERSPECTIVES
Nouvelles cartes, anciens joueurs
La plupart des spécialistes de communication politique insistent sur la part grandissante du divertissement dans la programmation et les émissions de télévision, et la domination de » l’infotainment » sur nos écrans. Ceci se traduirait par une désacralisation de la politique et de ses acteurs mais aussi une mise en scène des grands rendez-vous politiques et institutionnels tel que le vote de confiance demandé par un gouvernement. Le Premier ministre Manuel Valls s’est livré mardi 8 avril dernier à un exercice plus que périlleux tant cette déclaration de politique générale prend l’allure de la déclaration de la dernière chance. Un exercice aussi médiatique réussi avec un certain brio compte tenu de l’hostilité de bon nombre de parlementaires et pas seulement de droite. Mais le Premier ministre au » cœur battant » pour la France, a su manœuvrer habilement en ménageant les susceptibilités et en maintenant le suspense sur la nomination des secrétaires d’État ce qui a provoqué d’emblée une certaine docilité dans les rangs socialistes. Que nul ne s’étonne du départ médiatique de Cécile Duflot du gouvernement. Il s’agit pour l’ancienne ministre et leader des Verts de prendre date et de se placer d’ores et déjà dans l’horizon de sa candidature à la prochaine présidentielle, ce qui lui demandera certainement de prendre ses distances par rapport à la politique du gouvernement pour se constituer une nouvelle pelote d’électeurs. À droite, Jean-François Copé bénéficie d’un curieux état de grâce qui a enterré les récentes affaires et lui permet de bénéficier des victoires inespérées de toutes les listes UMP-UDI aux dernières municipales. Il redevient le leader de l’opposition, de façon calme et déterminée. Le premier ministre avance déjà à la façon d’un vice-président présidentiable en 2017. En comptant sur ses talents de communiquant, Manuel Valls a imposé tout de suite son leadership et sa méthode qui va modifier en profondeur un mode de travail politique jugé par tous obsolète et inadéquat au sommet de l’État. Gageons que la démarche du Premier ministre lui permet rapidement de pallier son manque de soutien structurel au sein du parti socialiste. Il ne contrôle pas le parti mais il va contrôler ouvertement et sans partage l’État et son gouvernement. Une nouvelle partie commence. Chez nous également les cartes sont rebattues et les pions avancent. Les dernières municipales ont installé un véritable rapport de force politique et dessiné des lignes ennemies pour chaque camp. Endogène et exogène, territoriale et nationale, la gauche locale est double. Pas une. D’un côté une gauche socialiste faisant partie de la majorité gouvernementale, de l’autre une gauche ouverte au regard de la campagne du deuxième tour des municipales, aux alliances avec une droite de plus en plus locale également. Garant de l’orthodoxie partisane, la fédération guadeloupéenne du parti socialiste crie à la trahison politique et idéologique. L’ex ministre de l’outre-mer marque un retour tonitruant et virulent, mais surtout médiatisé, en se plaçant au centre du débat et de la joute politique. On est avec ou contre Victorin Lurel. Là aussi face à ce même échiquier avec une nouvelle partie commencée, bien malin qui pourra dire qui sera le gagnant au final du citoyen ou du politique.
Une débutante en première ligne
Le 2 mai prochain elle rendra son siège à Victorin Lurel mais, fer de lance de plusieurs projets, Hélène Vainqueur-Christophe a accompli son premier mandat national comme si elle avait fait ça toute sa vie ! Elle s’est sentie soutenue par un nouvel état d’esprit qu’elle juge très favorable aux outre-mer.
L’Outre-mer intéresse à nouveau
La culture politique a changé. Nous ne sommes plus stigmatisés par les pouvoirs publics, nous sommes considérés non plus comme un problème mais comme une partie de la solution. Les très nombreux textes mis à l’ordre du jour témoignent je croîs d’un intérêt renforcé pour nos territoires. J’ai apporté mon soutien à Victorin Lurel dans son combat pour le maintien des moyens budgétaires, lequel est pour moi le signe que l’État est de retour dans les outre-mer. Et depuis la création de la délégation aux Outre-mer, les sujets nous concernant spécifiquement sont valorisés. Cette délégation est une instance précieuse. En moins de deux ans, elle est devenue le lieu de réflexions et de débats permettant d’étudier sur le fond les réalités ultramarines. Ses rapports ont permis d’enrichir considérablement les lois débattues.
Réparer des injustices
Dès le début 2013, j’ai décidé de reprendre la proposition de loi sucre présentée en 2011 par Victorin Lurel. Il s’agissait de corriger une injustice et je suis aujourd’hui fière du travail accompli. Dix-huit mois avaient été perdus, mais cela m’a permis d’enrichir le texte et de le faire adopter à l’unanimité. De même pendant plusieurs mois, j’ai soutenu avec la plus grande âpreté la réforme carburant, une mesure de justice et de transparence.
Une riche année parlementaire
En tant que rapporteure spéciale du budget, j’ai réalisé un rapport sur l’administration générale et territoriale de l’État, en engageant notamment une réflexion sur l’avenir de notre réseau préfectoral. Plus récemment, je me suis attelée à la réforme de l’agriculture proposée par le gouvernement. En tant que rapporteure de la délégation aux Outre-mer, j’ai souhaité que les spécificités de nos territoires soient prises en compte afin de conforter nos capacités d’exportation, de reconquérir notre marché local et de sécuriser la vie de nos agriculteurs. Au sein de la commission des Finances, je me suis essentiellement attachée à participer aux travaux de refonte de la défiscalisation. J’espère que cette réforme durable redonnera confiance aux investisseurs et aux employeurs.
L’expérience du terrain
Mon expérience du terrain, d’abord au conseil régional puis en tant que maire de Trois-Rivières, ma connaissance de la réalité de la vie de mes concitoyens m’aident à apporter aux problèmes des réponses concrètes. Je me consacre au fond des dossiers et je tente d’apporter moi-même les solutions les plus adéquates. Dans les prochains mois, les députés ultramarins travailleront au volet spécifique outre-mer du pacte de responsabilités : ils devront veiller à ce que soient encouragées les mesures en faveur des productions locales et de la reconquête du marché par nos propres entreprises. Il faudra également encourager la proposition faite par le président de la République de renforcer la participation de l’État au financement des emplois d’avenir. Il est souhaitable aussi que les outre-mer pèsent de tout leur poids sur les projets de loi biodiversité et transition énergétiques.
Une Guadeloupéenne maire de Vaulx-en-Velin
Vaulx-en-Velin est sous le choc : dans cette commune du Rhône, une nouvelle venue vient d’éjecter la municipalité communiste en place depuis… 85 ans. Et en plus Hélène Geoffroy la nouvelle maire, non contente d’être femme et socialiste, est Guadeloupéenne. Décidément on ne respecte plus rien dans ce pays !
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