La députée La France insoumise Mathilde Panot pointe des responsabilités de Veolia, maison mère de Générale des eaux, dans la vétusté des réseaux d'eau en Guadeloupe.

Exaspéré par les députés Insoumis, le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu a failli unir contre lui la quasi-totalité des députés ultramarins.

Il était 23 heures, ce 9 novembre, et beaucoup pensaient que la discussion des quelques 80 amendements au projet gouvernemental de budget de la mission Outre-mer, entamée en fin d’après-midi, allait s’achever sans encombre.

Certes, Sébastien Lecornu avait commencé à crisper les élus ultramarins en n’acceptant jusqu’alors aucun de leurs amendements. Pas même un seul de ceux auxquels avait donné un avis favorable Olivier Serva, rapporteur de la commission des finances, président de la délégation Outre-mer et élu LREM, donc de la majorité.

Un début de tension était aussi apparu quand le député LREM de Guadeloupe avait annoncé qu’il donnait un avis favorable à une série d’amendements en faveur de la continuité territoriale. Le ministre, bondissant du banc juste à côté, avait alors déploré qu' » on semble considérer que rien n’a été fait !  »

Ces amendements étaient à portée limitée pour le budget de l’État, puisque leurs auteurs ultramarins suggéraient des transferts de sommes modestes, destinés avant tout à rappeler leurs souhaits de voir mieux compensé le handicap lié à l’éloignement de leurs territoires, en augmentant le montant (ou le nombre des bénéficiaires) des aides financières destinées à ceux qui vont étudier ou se former dans l’Hexagone, ou à assurer le rapatriement des corps de défunts, au titre de la continuité funéraire.

Mais c’est sur la question de l’eau en Guadeloupe que le débat se sera franchement crispé. Défendant un amendement du député LFI de La Réunion Jean-Hugues Ratenon, la présidente du groupe Insoumis Mathilde Panot, également présidente de la récente commission d’enquête sur l’eau aux côtés d’Olivier Serva – dont le rapport et les recommandations ont été adoptés à l’unanimité, a-t-il rappelé – et auteure à ce titre d’un déplacement en Guadeloupe en juin, a demandé la mise en place d’un plan Orsec eau potable.

Comme Olivier Serva, le député LR de Mayotte Mansour Kamardine la soutient alors, expliquant qu’il connaît le problème, lui qui ne peut, quand il est à Mayotte, prendre de douche qu’un jour sur deux. Haussant le ton, le ministre – qui avait, trois heures plus tôt, accéléré la cadence pour pouvoir aller suivre l’intervention télévisée du président de la République – a alors sèchement accusé Mathilde Panot d’avoir des visées électorales.

Celle-ci a à son tour monté le son, et indiqué que le ministre ne peut en permanence se réfugier derrière la responsabilité des collectivités locales en matière de gestion des eaux. L’État a aussi des obligations en matière d’éducation et de santé, a-t-elle dit, en soulignant que le manque d’eau conduit à fermer des classes ou empêche de respecter un geste barrière élémentaire, se laver les mains.  » Jamais vous n’accepteriez ça dans l’Hexagone ! « , a lancé la députée Insoumis, applaudie.

L’amendement ayant été rejeté, Olivier Serva en a défendu un autre en faveur de la mise en place de citernes, et Jean-Hugues Ratenon un plan d’urgence de rénovation des réseaux. Le ministre ayant à nouveau donné un avis défavorable, le député PC de Martinique Jean-Philippe Nilor a raillé le groupe LREM, l’accusant d’avoir  » rappelé des troupes en masse pour voter contre les amendements des élus de terrain, ceux des Outre-mer « .

De fait, tous ces amendements ont été rejetés par une quarantaine d’élus de la majorité, alors qu’oppositions et ultramarins ne parvenaient à totaliser qu’une vingtaine de voix. Quelques instants plus tard, après que la députée LFI Danièle Obono a pointé le propos «  extrêmement méprisant  » du ministre, Jean-Hugues Ratenon a annoncé qu’il ne défendrait plus ses amendements. La présidente du groupe LFI Mathilde Panot a alors demandé et obtenu une suspension de séance.

L’idée d’un départ de tous les élus ultramarins, laissant les députés hexagonaux de la majorité discuter seuls avec le ministre, a alors été discutée dans le salon à la sortie de l’hémicycle, hors de portée des journalistes. Selon plusieurs élus interrogés par Le Courrier de Guadeloupe, des élus de la Réunion, des Antilles, de Guyane et de Mayotte, de droite comme de gauche, sensibles à des arguments «  humains, pas politiques « , étaient prêts à ne pas revenir. Mais  » des élus de droite ont invoqué le respect pour la présidente de séance LR Annie Genevard « , a confié un député. Les débats ont finalement repris. Sébastien Lecornu avait soudain un ton bien plus affable. Les derniers amendements ont été liquidés à un rythme accéléré.

Poster un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.