Le maire Jean-Philippe Courtois (arrière fleurs) préside en juillet la cérémonie de récompenses durant laquelle les bacheliers de la commune de Capesterre Belle-Eau se sont vu remettre 150 euros. Photo : FB Ville de Capesterre Belle-Eau

La commune de Capesterre Belle-Eau continue de faire face à de sérieux problèmes financiers, malgré la mise en place d’un contrat de redressement (Corom) en octobre 2023. Ce contrat, visant à redresser la situation entre 2023 et 2025, a accordé à la municipalité une subvention annuelle de 700 000 euros, augmentée de 200 000 euros en 2024. Cependant, le budget primitif de 2024 révèle un dérapage budgétaire « inquiétant ».

Un déficit qui explose

Selon les données publiées par la Chambre régionale des comptes (CRC) dans son avis daté du 13 septembre sur le compte administratif 2023 et le budget primitif de 2024, la section de fonctionnement de Capesterre Belle-Eau pour l’année 2024 présente un déficit de 2 198 185 euros, alors que le Corom prévoyait initialement un excédent de 5 060 947 euros. Ce décalage, qualifié de « fortement divergent » par la chambre, est un signe alarmant de la gestion financière de la commune.

« Les recettes réelles de fonctionnement sont conformes à la cible, mais les dépenses explosent », souligne le rapport de la CRC. Les charges à caractère général, par exemple, s’élèvent à 8,9 millions d’euros, alors que l’objectif fixé dans le Corom était de 5,6 millions. Cette augmentation significative de près de 60 % est particulièrement préoccupante.

Des dépenses de personnel hors contrôle

Une des raisons principales de ce déséquilibre tient à l’augmentation des dépenses de personnel, qui dépassent de 1,6 million d’euros les prévisions du Corom. Au total, ces charges atteignent 20,5 millions d’euros pour 2024, contre un objectif de 18,9 millions. La Chambre pointe notamment une augmentation du régime indemnitaire des agents de la commune, à hauteur de 750 000 euros, sans réduction du personnel.

« La commune n’a pas respecté les engagements pris, notamment en matière de réduction du nombre d’agents et de maîtrise de la masse salariale, » déplore la CRC dans son rapport.

La hausse des dépenses générales de fonctionnement, conjuguée à cette augmentation des salaires, contribue à accentuer le déséquilibre budgétaire.

Des projets d’investissement annulés

Face à cette situation financière critique, la municipalité a dû se résoudre à annuler plusieurs projets d’investissement. Le chapitre 13, relatif aux subventions d’investissement, a été réduit de 1,6 million d’euros. Parmi les projets abandonnés, on note la rénovation des halles (-274 000 euros), la mise aux normes de l’éclairage public (-607 600 euros), et la signalétique de l’avenue Paul Lacavé (-156 000 euros). Ces annulations s’expliquent principalement par un manque d’autofinancement et la caducité de certaines subventions.

D’autres projets, liés notamment aux conséquences de l’ouragan Fiona, ont cependant pu être maintenus. Il s’agit, entre autres, de la réfection des voiries (+ 334 400 euros) et de la réparation de la voie de circulation du carbet post-Fiona (+ 105 000 euros).

Une fiscalité figée, malgré les recommandations

Malgré cette situation budgétaire préoccupante, la commune persiste dans sa volonté de ne pas augmenter la fiscalité locale. Le rapport note que « la commune ne souhaite pas mobiliser l’outil fiscal pour accroître ses recettes ». Elle préfère s’appuyer sur la tendance naturelle à la hausse des taxes foncières, en espérant ainsi compenser, au moins en partie, les dérives constatées.

Cette attitude, qui vise à ménager les contribuables, est pourtant critiquée par la CRC. L’institution recommande une révision à la hausse des taux de fiscalité foncière pour se rapprocher de la moyenne départementale, ainsi qu’une valorisation accrue des biens communaux. Elle invite également la municipalité à développer davantage les produits des services et à mieux exploiter son domaine public, notamment en percevant des redevances funéraires et des loyers sur les biens bâtis non utilisés.

Des recommandations pour redresser la barre

Dans ce contexte délicat, la Chambre régionale des comptes a formulé plusieurs recommandations pour tenter de remettre Capesterre Belle-Eau sur les rails. En matière de dépenses, elle conseille une réduction drastique des charges à caractère général. Pour les dépenses de personnel, elle préconise de maîtriser la masse salariale en limitant les avancements et les promotions, tout en optimisant les redéploiements internes.

« Le respect du contrat de redressement passe par une révision profonde de la gestion des ressources humaines et une plus grande rigueur budgétaire », insiste la CRC.

En matière d’organisation financière, elle recommande également un suivi strict des opérations d’investissement pour éviter la caducité des subventions, une mise en place du paiement en ligne pour améliorer le recouvrement, et un contrôle accru des régies de recettes.

Vers une sortie de crise ?

Il apparaît que les finances de Capesterre Belle-Eau se trouvent dans une zone critique. La mise en œuvre du Corom est jugée insuffisante, et la trajectoire budgétaire actuelle est loin d’être compatible avec les engagements pris en 2023. Si la commune ne parvient pas à redresser la barre, elle pourrait se retrouver dans une impasse financière encore plus sévère.

Jean-Philippe Courtois, maire de Capesterre-Belle-Eau, s’est exprimé dans un communiqué pour dire sa stupéfaction face aux conclusions de la CRC. Il s’étonne du déficit annoncé au regard des contrôles effectués par la CRC en 2021, 2022 et 2023. Il souligne que certaines dépenses de 2017, comme celles liées à la RHI de Brest pour près de 2 millions d’euros, ont été prises en compte malgré un protocole transactionnel signé avec la Semsamar. Il mentionne également l’apparition de dettes sociales supplémentaires en 2024 et la sous-estimation ou omission de certaines recettes, telles que la FCTVA et des subventions EDF.

Le maire a transmis à la préfecture les justificatifs prouvant, selon lui, l’amélioration de la situation financière et comptable de la ville, et attend les conclusions de cette dernière.

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