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De grâce, votons !

L’abstention. Vaste sujet auquel les commentateurs répondent inlassablement avec les mêmes mots, les mêmes arguments et souvent les mêmes faux-fuyants. Longtemps la frange indépendantiste l’a interprétée comme une adhésion à ses thèses. Ayant flairé le bon filon, les leaders nationalistes ont fait campagne avec un slogan désormais connu : l’abstention révolutionnaire et son ersatz  » pa voté « , placardé sur tous les murs, à l’occasion de chaque scrutin. Personne n’était dupe. Surtout pas ceux qui menaient campagne sur ce thème. Ils savaient fort bien que cette absence d’engouement de notre population à l’égard des élections relevait davantage d’une apathie inexpliquée que d’une quelconque foi nationaliste. Le procédé n’a plus cours. L’abstention est toujours aussi vivace. À tel point que, lorsque par extraordinaire, nous votons à 60 %, et ce, seulement à l’occasion des élections municipales, les commentateurs crient à la performance. Le peu d’entrain des Guadeloupéens à aller voter est assimilé aussi comme un manque de maturité démocratique, un refus de s’assumer en tant que citoyen responsable. Beaucoup y voient un travers propre aux pays sous-développés qui souvent n’ont découvert l’élection démocratique que depuis peu. D’autres sont convaincus que seul un intérêt immédiat, personnel, particulier, souvent matériel peut motiver les électeurs guadeloupéens. De façon encore plus triviale, beaucoup considèrent qu’aucun candidat à une élection ne peut prospérer s’il ne consacre aux pilons de poulet et aux sek avalés goulûment, quelque budget.

Toutes ces raisons chacune à des degrés divers peuvent expliquer peu ou prou les taux de participation dérisoires qui caractérisent notre territoire. Sauf que ce premier tour des élections législatives a atteint un tel niveau de désaffection que nous ne pouvons plus avancer les rengaines sempiternelles évoquées plus avant. Et ce, même s’il s’agit d’une élection législative réputée peu motivante. Premier constat les candidats n’arrivent pas à mobiliser. Certains élus peuvent faire mine de le découvrir. Beaucoup savent que sans l’apport d’une grande partie de leur personnel communal, beaucoup de maires auraient fort à faire pour se maintenir en place. L’élection législative met la loupe sur toutes ces tares parce qu’elle sollicite les électeurs au-delà des frontières de la commune.

De surcroît, celle-ci intervient en plein chamboulement politique. Depuis près de quatre ans, la télévision ne parle que de malversations, de détournements de fonds publics. Pendant la campagne de l’élection présidentielle, l’affaire Fillon s’est changée en vrai feuilleton avec des révélations chaque jour plus croustillantes. Sur notre territoire, les mises en examen vont bon train également. Dans ce contexte, il devient de plus en plus difficile de convaincre celui qui tire le diable par la queue d’aller voter. En dépit pourtant de toutes ces tares accumulées, et nonobstant la légèreté de certains politiques, le vote libre reste la plus grande conquête du citoyen. Sans les élections, il n’y aurait pas de démocratie. Nous aurions tort de renoncer à désigner ceux qui nous gouvernent. Sanctionnons avec notre bulletin ceux qui ne nous satisfont pas. Bousculons les scénarios entendus s’il le faut, montrons que ce sont nous les électeurs qui détenons le pouvoir, parce que nous le conférons. Mais de grâce votons !

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