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Les leçons d’un scrutin

Le sacre d’Henri Nagapin à la tête de la Chambre de commerce et d’industrie des îles de Guadeloupe est somme toute logique. Le groupe Koury disposait d’un nombre d’élus plus important – si ce n’est la majorité dès le départ – que ses alliés, devenus ses concurrents lors du vote pour élire le président et les membres du bureau. On peut se demander par quel tour de passe-passe le Medef Guadeloupe espérait-il renverser la vapeur ? La même question se pose en ce qui concerne le groupe des entrepreneurs du Bâtiment et des travaux publics (BTP) emmené par José Gaddarkhan. D’autant que ces deux groupes, qui au premier tour ont chacun réuni onze voix, n’ont rien voulu céder. Ils n’ont trouvé aucun accord. Les entreprises du Bâtiment et des travaux publics en tant que force organisée ne s’étaient jamais invitées à pareille fête. Elles découvraient l’ambiance, l’âpreté des échanges, la volatilité des individus et la mouvance des situations. Chaque membre élu, et par conséquent chaque voix, peut devenir  » une planche pourrie et du sable mouvant  » se plaît à raconter un habitué de ces cénacles. Et à tout moment insiste-t-il. Le Medef Guadeloupe n’était pas dans la même position que le BTP. Il jouait certainement plus gros.

Certes, il faut remonter à loin pour retrouver un membre du Medef, à l’époque l’Union patronale, au poste de président de la Chambre de commerce. L’arrivée de Georges Marianne, un des fondateurs de l’Union des moyennes et petites entreprises de Guadeloupe (Umpeg), à la tête de la CCI de Pointe-à-Pitre a porté un coup d’arrêt aux présidences assurées par les  » grands patrons « . Sous l’ère d’Amédée Adélaïde, ils participaient encore activement au bureau. Et puis, devant le savoir-faire électoral du groupe Koury, le Medef s’était effacé. Revigorées par une marche obstinée vers une union de façade des différentes organisations patronales, les éminences grises du syndicat des grandes entreprises s’étaient plu à penser à un possible  » dématé  » du groupe Koury. C’était mal connaître les habitués de l’élection consulaire. De fait, tel est pris qui croyait prendre. Et l’histoire se termine de la plus mauvaise manière qui soit. Les caméras de Canal 10 ont offert aux téléspectateurs un spectacle de chefs d’entreprise qui s’écharpent, du plus mauvais effet.

Au final, derrière l’élu idoine, le groupe Koury, frère, fils et leurs alliés ont raflé toutes les places du bureau. Non point parce qu’il les voulait toutes, mais parce que les membres du Medef déçus les ont déclinées. Par dépit. Résultat : voilà la Guadeloupe en présence d’une Chambre de commerce monochrome et entre soi, du plus mauvais effet. Au-delà du triomphe des uns, cette élection consulaire a consacré l’échec du Medef Guadeloupe, toujours incapable de gagner une élection chez ses pairs. Ce n’est peut-être pas le plus grave. Les temps ont peut-être définitivement changé. Et puis, tout le monde n’est pas censé connaître toutes les arcanes d’un jeu hautement sophistiqué (sic). En revanche, il y a comme un hiatus à vouloir en profiter l’air de rien, en humant débonnaire, le vent qui passe. Il y a là quelque chose de doublement amoral.

C’est aussi un cuisant échec pour Alan Nagam. Prétendant incarner le courage et une autre voie, il s’est d’abord grisé au début de la campagne pour devenir à la fin inconsistant, vague et de moins en moins chef de guerre. Finalement, il n’y a pas de mystère : ce sont ceux qui sont les plus à leurs affaires qui les font prospérer. Il faut croire que les élections consulaires ne sont ni l’affaire du Medef Guadeloupe ni celle du groupe Nagam. Ce sont là, les leçons d’un scrutin.

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