Ce jeudi 21 novembre, le tribunal de Pointe-à-Pitre a rendu son verdict. Rodrigue Solitude, ancien chef de cabinet du président de la Région Guadeloupe, Ary Chalus, a été reconnu coupable de prise illégale d’intérêts et condamné à un an de prison avec sursis, 15 000 euros d’amende, et une interdiction d’exercer une fonction publique ou d’être élu pendant cinq ans.
Une sanction allégée
Si la condamnation marque un pas vers la responsabilisation dans la gestion des fonds publics en Guadeloupe, le tribunal a opté pour une peine plus légère que les réquisitions du procureur. Ce dernier avait demandé deux ans de prison avec sursis, une amende de 40 000 euros, ainsi qu’une interdiction de cinq ans de toute fonction publique, invoquant « le symbole, et pour protéger la société ces cinq prochaines années ».
En réponse à sa condamnation, Rodrigue Solitude, aujourd’hui directeur général par intérim du Comité du tourisme des îles de Guadeloupe, a déclaré : « Je ferai bien évidemment appel de cette décision. »
Une subvention controversée
Au cœur de l’affaire se trouve la société Respire +, créée pour produire des masques chirurgicaux en pleine crise du Covid-19. L’entreprise avait été saluée comme un projet pionnier pour les Antilles lors de son inauguration en septembre 2020. Elle avait bénéficié de 450 000 euros de subventions publiques allouées par la Région.
Des zones d’ombre sont apparues lorsque l’enquête, ouverte en mars 2021, a révélé que Rodrigue Solitude avait investi près de 200 000 euros dans la société et déposé son logo et sa marque. Ces éléments ont conduit à sa mise en examen pour avoir profité de sa position au sein de la Région pour faciliter l’obtention des subventions.
« Il a utilisé son influence pour contourner les règles d’impartialité et détourner des fonds publics à son propre profit » a fustigé le parquet lors de l’audience du 17 octobre.
Respire + avait rapidement montré des signes de fragilité, avant d’être placée en liquidation judiciaire en avril 2023. L’administrateur judiciaire a estimé le préjudice à plus d’un million d’euros. Lors de la liquidation aux enchères, l’ensemble des actifs de l’entreprise n’a rapporté que 20 000 euros, une somme dérisoire par rapport aux investissements initiaux.
Un préjudice citoyen
Certains observateurs craignent que les sanctions ne suffisent pas à dissuader les pratiques frauduleuses. « Si des responsables publics sont condamnés mais continuent à exercer leur influence, que ce soit en fonction ou en coulisses, c’est l’ensemble de notre système qui est mis en péril » explique un observateur politique qui a suivi l’affaire de près.
Grâce à son recours en appel, Rodrigue Solitude bénéficie de la suspension de l’exécution de sa condamnation en première instance. Il reste à la tête du Comité du tourisme des îles de Guadeloupe (CTIG), organisme satellite de la Région et du Département chargé du tourisme dans l’archipel.
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