Nous sommes comme l’oiseau sur la branche. Nous vivons dans une grande incertitude sur un territoire dangereux, dont les attraits enchanteurs sont trompeurs. Personne ou presque ne veut le savoir. Nous chassons promptement l’idée selon laquelle nous sommes de petites îles fragiles. Des territoires situés dans une région que les ouragans se plaisent à balayer sévèrement à la même période de l’année. Nous ne voulons pas savoir non plus que nous vivons sur un volcan encore en activité. Et nous ne voulons surtout pas entendre qu’un jour sans crier gare – c’est la particularité du phénomène – un séisme viendra nous rappeler au mauvais souvenir des 3 000 morts du tremblement de terre de 1843. Bah, c’est loin. Trop loin, sûrement.
Nous, c’est vous. C’est moi, c’est chacun de nous, citoyens ordinaires qui ne nous préparons jamais à l’arrivée d’un ouragan. Nous qui voulons construire au plus près de la mer. Nous, ce sont aussi nos dirigeants, élus, hauts fonctionnaires, qui ferment les yeux sur les entorses faites aux règles de sécurité en matière de construction. Il n’y a pas que le bord de mer qui soit dangereux et prisés. On peut avec de l’entregent et sans doute quelque argent, obtenir un permis de construire dans des zones inondables, des zones humides, des zones liquéfiables, des zones submersibles. Toutes, réputées inconstructibles.
L’implantation des infrastructures publiques participe aussi à cet aménagement du territoire inconséquent. Elle passe outre les contraintes géographiques et climatiques. Les professionnels de la construction rivalisent de techniques, afin de repousser les limites de l’impossible. On n’arrête pas le progrès.
Question : les trouvailles appliquées afin de déclarer constructible une zone dangereuse sont-elles toutes applicables en terre de cyclones, en zone de séisme, et en pays de volcan ? Quelle idée a-t-on eu de construire le CHU de Pointe-à-Pitre/Abymes sur une faille sismique, pour avoir l’obligation de le démolir quarante ans plus tard ? Pourquoi a-t-on choisi de construire l’hôpital de Capesterre Belle-Eau à Bananier, juste au pied de la Soufrière ?
Sait-on selon les bons mots d’un haut fonctionnaire lors d’une réunion des services de l’État, il y a une vingtaine d’années, que Jarry est une bombe avec une mèche allumée ? Le cadre avait ajouté : » Ce qu’on ne sait pas c’est la longueur de la mèche « . N’empêche à Jarry, il y a une clinique, des habitations, des crèches… Bref, la notion de risque n’est pas le souci premier de ceux qui conçoivent l’aménagement du territoire. Ou alors si peu… C’est pourtant par là que devrait commencer la prévention.
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