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La chasse aux rats réouvre à Pointe-à-Pitre

La concentration de rats est plus importante à Pointe-à-Pitre qu’ailleurs en Guadeloupe. La ville la plus fréquentée de Guadeloupe, tant par les écoliers que les chalands, peine à assurer un service de salubrité et d’hygiène efficace. Les témoignages recueillis et les reportages réalisés montrent que les nuisances débordent inexorablement.

SANTE PUBLIQUE

La nouvelle et longue opération de dératisation concerne six quartiers

Depuis lundi 15 février la ville de Pointe-à-Pitre a entamé une vaste campagne de dératisation. Plaques d’égout, tuyauteries, câblages électriques, crevasses et encombrants vont être passés au crible et traités sur une dizaine de sites de la ville, parmi lesquels la résidence Beauperthuy, la tour Secid, les tours Faidherbe ou encore l’école primaire et maternelle Cidemé Salvador. L’opération, assurée par la société spécialisée THA doit se poursuivre jusqu’au 18 mars.

 » Cette campagne fait suite à la démolition, en décembre 2015, de la barre AA de la Cité Henry 4 à Bergevin. Les travaux engagés ont délogé les rats qui vivaient dans les sous-sols du bâtiment, les contraignant à migrer dans les immeubles environnants  » nous a précisé Guy Naprix directeur adjoint au service technique de la ville de Pointe-à-Pitre. Ce phénomène est récurrent et avait déjà été observé lors de démolitions précédentes.  » Les opérations de dératisation visent à réguler les populations de rats, et non à les éradiquer  » a-t-il modéré. La municipalité mène chaque année cinq à six campagnes de dératisation sur son territoire, mais pour quels résultats ?

Aux armes citoyens

 » La concentration de rats est plus importante à Pointe-à-Pitre qu’ailleurs en Guadeloupe en raison de la densité de la population « , confie Didier Clotilde de la société Techno Hygiène Antilles (THA) en charge de l’opération de dératisation en cours. 5 864 habitants au km carré dans Pointe-à-Pitre en 2012 selon l’INSEE, contre 1 995 à Basse-Terre, l’autre centre urbain du département. Pour Marcel Sigiscar adjoint au maire de Pointe-à-Pitre interrogé le 17 février, la lutte contre la prolifération des rats passe par des actions fortes de la municipalité mais également par un changement de comportement des habitants de la ville. Déjà en 2010, la ville éditait un guide «  des bons gestes pour ma ville  » pour des Pointois plus éco-citoyens.

Des interventions ciblées ou à la demande

Les campagnes de dératisation menées sur le territoire de Pointe-à-Pitre sont programmées en fonction des remontées de terrain des élus locaux et des administrés et sont mises en place sur le domaine public (bâtiments publics, établissements scolaires, tuyauteries, armoires électriques etc.). Les bailleurs sociaux sont invités à se joindre à ces campagnes afin de les rendre plus efficaces.  » Avant les rats allaient se cacher dans les sous-sols des immeubles et reprenaient possession de l’espace public à la fin des traitements. Maintenant nous demandons aux bailleurs de dératiser en même temps que nous « , commente Guy Naprix.

Records de leptospirose pour la Guadeloupe

En 2013, une étude menée par l’institut national de veille sanitaire et l’institut pasteur faisait état d’une centaine de cas de leptospirose chaque année en Guadeloupe. La prévalence de la maladie est importante dans notre département avec plus de 22 cas pour 100 000 habitants contre un peu moins de 14/100 000 en Martinique, et 0,47/100 000 en France hexagonale.

Le chiffre

2 500 individus. C’est le nombre de descendants qu’un couple de rats des villes peut engendrer au cours de sa vie selon les estimations des spécialistes. En plus d’être insatiable, l’animal est aussi très prolifique et chaque femelle peut donner naissance à une soixantaine de petits chaque année.

TEMOIGNAGE

Et les rats envahirent les moteurs des voitures…

Fils rongés, durites trouées, turbos explosés, coupable identifié : le rat. Plongée au cœur des nouveaux terrains de jeu du surmulot.

Août 2015, quartier de l’Assainissement Pointe-à-Pitre. Mylène s’installe au volant de sa voiture pour se rendre à son travail. Sa Citroën Picasso refuse de démarrer. Remorquée chez le concessionnaire, elle apprend qu’un rat a mangé des fils du faisceau électrique et le filtre à air de sa voiture. Il faudra trois jours pour déloger le rongeur gros comme un chat, avant de pouvoir démarrer les travaux de réparation. Cinq mois plus tard, même mésaventure pour Mylène. C’est de nouveau le filtre à air du véhicule qui est endommagé par un rat. Face à la puanteur dégagée, le mécanicien attendra que la bête soit complètement desséchée avant de s’attaquer à la panne. La facture plutôt salée – près de 1 400 euros – ne sera pas remboursée par l’assureur au motif que  » l’intervention ne relève pas d’un caractère accidentel, nécessaire à la mise en œuvre des garanties  » de son contrat. Et d’autres voisins ont vécu les mêmes aventures.  » Il y a trois ans, témoigne une autre automobiliste, j’ai eu la même déconvenue. J’habite en centre-ville de Pointe-à-Pitre et il y a beaucoup de rats dans ma rue. Un jour, ma voiture a refusé de démarrer. Mon mécanicien, m’a expliqué que des rats avaient grignoté des fils dans mon moteur.  » Elle adresse un courrier au maire de la ville pour signaler  » la présence massive de rats dans les rues « . En réponse, elle a reçu  » l’assurance que la lutte contre les rongeurs était effective dans la ville « , calendrier des interventions de dératisation à l’appui. Trois ans plus tard, les rats sont toujours aussi nombreux dans les rues.

L’amidon de maïs ouvre l’appétit

Les principaux concessionnaires automobiles confirment des prises en charge régulières de pannes causées par des rats. Pas de statistiques précises, mais les plus importants signalent jusqu’à un cas par semaine. Les garagistes tiennent le même langage. Dans son atelier de Bergevin, à Pointe-à-Pitre, René reçoit quelques clients pour la mécanique. Chez lui sont passées des voitures victimes des rats.  » Des clients viennent pour des pannes moteur et nous constatons que c’est à cause des rats  » commente l’entrepreneur. Un autre de ses confrères, n’est pas plus surpris par le sujet. Chez lui, c’est régulier il a «  même eu un cas où c’est le turbo qui a explosé à cause d’un rat « . Selon le journal 60 millions de consommateurs, il faut chercher l’explication de cet engouement des rats pour les moteurs de voitures dans l’utilisation des nouveaux bio-matériaux choisis pour la confection des fils et autres durites. Pour limiter leur impact environnemental, des normes européennes obligent les constructeurs à privilégier des matières recyclables. Sauf que amidon de maïs et caoutchoucs isolants de câbles, fabriqués avec d’autres éléments d’origine animale ou végétale, ont fort bon goût pour le rat.

REPORTAGE

Des voisins inquiétants

Nous sommes samedi soir, à peine 19 heures. En cette mi-février il fait encore frisquet et le temps est propice à une balade. À peine le nez dehors, des ombres furtives attirent l’attention, disparaissent dans un bruissement pour réapparaître un peu plus loin. En y prêtant plus attention, une paire d’yeux, puis deux, puis trois, peut-être même cinq ou six apparaissent comme sorties des entrailles de la terre, où elles disparaissent au moindre pas en leur direction. Ce sont des rats dont la taille et la prolifération ont de quoi inquiéter. L’animal, qui peut tout de même peser 500 grammes, n’est pas facilement repu. Il mange de tout et surtout beaucoup. Son terrain de chasse est riche en zones d’approvisionnement. Ce soir-là, leurs museaux ronds et leurs moustaches dépassent à peine des nids qu’ils se sont choisis au sol. En un clin d’œil, ils sortent de leur trou, bondissent dans une canalisation délabrée, et s’en vont chercher pitance dans ces bennes, où s’accumulent les déchets de la ville-centre. Ils regagneront leurs logis pour en repartir presqu’aussitôt, et reprendre le même chemin. C’est donc avec ce voisin fort peu engageant que les citadins doivent composer.

Pratique : remèdes de grand-mère ou solutions techniques, des parades existent:

1. éviter de garer sa voiture à proximité des endroits où nichent les rats

2. pulvériser sur son moteur un spray qui diffuse un film au goût désagréable pour les rongeurs

3. poser un boîtier à ultrason dans le compartiment moteur

4. disposer quelques boules de naphtaline dans le compartiment moteur

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