Jésus business

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Dieu est partout. Mis à toutes les sauces, y compris aux tambouilles les moins ragoûtantes. Pas seulement comme l’Occident a tendance à le croire dans les pays musulmans, où les fidèles passent volontiers pour des fanatiques, mais aussi en Europe et encore plus aux États-Unis. La Guadeloupe connaît elle aussi ce regain de ferveur généralisé. La prédiction André Malraux serait-elle en train de se réaliser ? Le vingt-et-unième siècle est-il condamné à être religieux ? En tout cas, cela fait déjà plusieurs années que la foi est tendance. Mais les nouveaux dévots de Dieu n’ont plus beaucoup d’appétence pour les rites catholiques traditionnels. Ils sont happés par de nouveaux prêtres, de nouvelles églises qui promettent force miracles à base de guérison, de délivrances, de bonheur infini… et d’un viatique pour le paradis. L’ennui c’est qu’en offrant leur âme, les nouveaux convertis que la lumière ou la grâce a touché perdent aussi l’esprit. C’est dire si leurs biens matériels deviennent peu de chose. Ils sont nombreux ainsi, à se faire détrousser avec un consentement empreint de béatitude. Heureux sont les pauvres d’esprit disent les écritures. Et Alléluia !

Sauf que toute cette débauche de prières, de contrition, de sacrifices n’est pas perdue pour tout le monde. Pendant que les fidèles reportent à plus tard la félicité dans les cieux, les grands prêtres, pasteurs ou gourous se pourlèchent les babines de mets fins, roulent carrosse et logent dans des palaces. Les ouailles pourvoient aux nourritures terrestres dont ne peuvent se passer les nouveaux messies. Les brebis remises sur le droit chemin de la repentance, oui. Seule la foi nous sauve ! Il faut dire que les pasteurs du XXIe siècle déploient quelques talents pour convaincre, subjuguer et envoûter. Manipulateurs en diable (pardon), ils ont tôt fait de tondre la brebis. Si les messes, réunions et rassemblements sont le sel de la vie pour les convertis, pour ceux qui les ont anesthésiés tout cela n’est que mises en scène, décorums et apparats. Des outils bien rodés qui servent à maintenir en état d’hébétude le petit peuple de Dieu.

Des familles entières ont ainsi explosé au nom de Dieu, dont ces escrocs se réclament abusivement. Des enfants ont été traumatisés à jamais par le comportement d’une mère ou d’un père envoûté. Le pire c’est que dans ce marais mystique, on s’y perd. Et les pouvoirs publics sont bien souvent désarmés pour agir. Au nom bien sûr de la liberté du culte. L’État n’entend intervenir que contre les sectes. Et c’est souvent déjà très compliqué. Mais plus encore, qui est Église ? Qui est secte ? La frontière entre les deux semble bien ténue. C’est souvent quand le mal est fait que les pouvoirs publics interviennent.

Je ne fais pas ici le procès de Dieu. C’est même une belle idée Dieu. La perfection. Le modèle vers lequel chaque homme doit tendre. Cela nous ferait un monde merveilleux ! Et puis, l’homme n’est pas que chair. Il est aussi spiritualité. C’est cette dimension qui le distingue du monde animal. Quel que soit son niveau de progrès, aucune société, aucune civilisation n’a pu se passer de religion, de rites, et de spiritualité. En revanche, il est impérieux de débusquer et de dénoncer ceux qui se réclament de Dieu pour en faire commerce, en tirer de juteux profits. Moyennant l’assujettissement, la subordination d’esprits trop faibles pour faire preuve de discernement, entre ce qu’on peut consacrer à la vie spirituelle, et ce qui participe de l’aliénation totale. Pas simple. Pas facile du tout de naviguer sur une crête si mince, qui se situe entre foi et envoûtement et qui appartient au monde de l’irrationnel. L’équilibre est une position instable, difficile à tenir. Le juste milieu prôné par Aristote ne semble pas non plus de mise dans ces affaires spirituelles. Malgré tout, la vigilance doit rester de rigueur. Informer sur ce foisonnement d’églises, s’interroger sur leurs agissements, c’est déjà une veille sanitaire. Ainsi soit-il.

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