Distorsion

Le tribunal de Paris a décidé que le journal « L’Humanité » ne profère aucune insulte envers les frères Despointes, lorsqu’il décrit le salariat pratiqué par le groupe, à l’aune d’un relent d’esclavagisme. C’est de la sociologie, dit en substance le tribunal. Sur la base de faits identiques, le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre, et la cour d’appel de Basse-Terre ont condamné avec sévérité la Confédération générale des travailleurs de Guadeloupe (CGTG) et deux de ses membres. Sans vouloir hurler avec les loups, cette distorsion dans l’interprétation du droit, selon que le jugement soit rendu à Paris ou en Guadeloupe interpelle. Elle apporte du grain à moudre à ceux qui pensent – a minima — que la justice n’est pas sereine sous les tropiques. Dans certains milieux où ne prospéraient pourtant pas les idées indépendantistes, on avait coutume de chuchoter : « Dans les colonies on ne rend pas la justice, on rend des services« .

Toute la question est de savoir si en Guadeloupe nous sommes encore en colonie ou dans « l’archipel France », chère à Emmanuel Macron. Car cette façon de concevoir la France comme un archipel interdit qu’on soit plus Français en Bretagne qu’en Guyane, et à Paris plus citoyen qu’en Guadeloupe. Le citoyen français doit être en Guadeloupe comme il le serait à Bordeaux ou à Tourcoing. Est-ce trop demander aux citoyens de l’Hexagone d’être respectueux des contrées de l’Outre-mer et de ceux qui y vivent ? Sur la radio France inter, mardi 17 juillet, l’émission « Le téléphone sonne » traite des personnes condamnées pour terrorisme qui vont bientôt sortir de prison.

Un auditeur interroge : Nous avons peur. Pourquoi ne regroupe-t-on pas ces gens en Guyane ? Qu’une triple buse lambda puisse poser cette question ne m’offusque guère. En revanche, je m’interroge sur la capacité des spécialistes autour de la table à situer les enjeux. À moins qu’ils n’aient que mépris pour la Guyane. À cette émission, il y avait le porte-parole du ministère de la Justice, un chercheur au centre d’étude de la sécurité et… des journalistes. Aucun d’entre eux, n’a trouvé la question choquante. Aucun n’a pensé que les Guyanais auraient peut-être leur mot à dire. La Guyane dépotoir de la France. Même dans les milieux dits éclairés, cela va de soi ?

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