Accueil Société Claudius Bhiki, un mari dévasté par le décès brutal de son épouse

Claudius Bhiki, un mari dévasté par le décès brutal de son épouse

Quatorze ans après la mort de son épouse, Claudius Bhiki est sous le choc. Le procès des présumés responsables de son malheur ne l’a pas convaincu. L’homme vit dans le culte de sa femme, bien décidé d’obtenir justice. Portrait.

Ils ont détruit ma vie « . Claudius Bhiki a répété ces mots une dizaine de fois ce mercredi 7 novembre au téléphone. Trois ans après la mort soudaine de Martine son épouse, survenue en janvier 2005 à la clinique Tirolien de Basse-Terre, à la suite d’une liposuccion, Claudius Bhiki avait déjà martelé cette phrase. Ce jour-là, assis sur le divan de son salon, il avait commenté avec des sanglots dans la voix, les portraits de sa femme. Aujourd’hui, le chagrin du veuf n’affleure plus autant. Pourtant, sa rage et sa colère s’expriment toujours avec force.  » Le procureur a prononcé des réquisitions ridicules à l’encontre des responsables de la mort de ma femme. Jusqu’à demander la fermeture d’une clinique déjà fermée et en faillite depuis 2009. Il faut le faire. C’est maintenant que je vais me battre. L’affaire Bhiki n’est pas finie « , s’indigne-t-il. Claudius Bhiki n’est plus dans l’émotion. En revanche, il est toujours abasourdi. Sa fille Katharina jointe au téléphone décrit un homme encore imprégné de sa femme, quatorze ans après la mort de cette dernière.  » Le décès de ma mère a été pour mon père une catastrophe. Il est toujours sous l’effet du choc « . Katharina révèle l’obstination de Claudius à servir le café de son épouse chaque matin. Elle se souvient qu’elle s’était battue pour qu’il arrête de lui servir aussi ses repas à table.  » J’avais 21 ans et mon frère six. Cela ne nous faisait pas du bien. Même si nous étions aussi affectés que lui « .

Amour fusionnel

Tant que ses enfants furent chez lui, Claudius Bhiki renonça à servir les repas de Martine. Aujourd’hui qu’ils ne sont plus là, il avoue qu’il a recommencé. Lorsqu’il va se recueillir sur la tombe de sa femme, Claudius Bhiki emmène bougies, fleurs… café et repas. La maison des époux Bhiki juchée sur un petit monticule à Trois-Rivières est devenue un musée dédié à Martine Bhiki. Les murs sont parsemés de photos d’elle. Lorsqu’on lui fait remarquer qu’on ne peut vivre avec les morts, la réponse du maître des lieux fuse :  » Je ne suis pas fou. J’ai seulement décidé de consacrer ma vie à ma femme. Je lui dois tout le bonheur que j’ai eu. Sa mort a été pour moi une descente aux enfers « . Katharina confirme l’amour fusionnel que vivaient ses parents.  » Ils étaient partout ensemble. Ils se vouaient un amour intense et avaient l’un pour l’autre une attention de chaque instant « .

Pas sortis d’affaire

Dire que Claudius Bhiki s’est battu pour établir la responsabilité des médecins et les faire condamner est peu de chose. Il avait 50 ans au moment des faits. Près d’une quinzaine d’années plus tard, l’homme est toujours habité par la même hargne. Sa santé s’est dégradée. Il ne conduit plus sa voiture. Il n’a pas pu continuer son activité de gérant de PMU. Il passe maintenant l’essentiel de son temps à lire. «  Lecture active et utile « , précise-t-il. Claudius Bhiki est à l’affût de toute information qui pourrait l’aider à mener à bien son combat. Il passe des heures sur internet à rechercher des personnes victimes de fautes médicales.  » Beaucoup ont connu le même malheur que moi. Un de leurs proches a été victime d’incompétence à l’occasion d’une liposuccion. Je leur envoie un mot, des condoléances. Parfois on se parle au téléphone. Je suis resté en contact avec quelques-uns « .

Cour européenne de justice

Dans ses recherches, Claudius Bhiki privilégie surtout les informations juridiques.  » Qui a réussi à obtenir quoi, comment et pourquoi ? De sorte que je puisse faire de même. Tant que j’aurai un souffle de vie, ils ne seront pas sortis d’affaire « , martèle-t-il. Claudius Bhiki a déposé plainte contre tous ceux qui de près ou de loin pouvaient être concernés par l’affaire. Les médecins au premier chef, bien entendu. Mais aussi contre l’ancienne Direction des affaires sanitaires et sociales (Dass) devenue Agence régionale de santé (ARS)  » Cette administration aurait dû savoir que cette clinique n’était pas aux normes. Elle aurait dû prendre les dispositions nécessaires « , fustige Claudius Bhiki. L’homme a poursuivi aussi le maire de Basse-Terre de l’époque qui avait connaissance des quatre avis de fermeture de l’établissement délivrés par la commission de sécurité. Idem en ce qui concerne le préfet d’alors qui aurait dû se substituer au maire défaillant, selon Claudius Bhiki.  » La séquence de Basse-Terre est une parodie de procès. J’étudie d’ores et déjà les voies et moyens qui me sont offerts afin d’aller plus loin. S’il le faut, j’irai devant la Cour européenne de justice « , conclut-il.

LES PEINES REQUISES NE SATISFONT PAS LA FAMILLE

23 novembre. C’est la date du délibéré du procès des médecins présumés responsables de la mort de Martine Bhiki qui s’est déroulé lundi 5 novembre au tribunal correctionnel de Basse-Terre. Entrée à la clinique Tirolien en janvier 2005 afin de subir une liposuccion, la jeune femme n’en est jamais revenue. Le procureur a requis 1 000 euros d’amende à l’encontre de Thérèse Happsa. L’épouse du docteur Daniel Grasset qui procédait à l’intervention chirurgicale officiait en tant qu’infirmière. Elle n’est pas diplômée. 1 000 euros et huit mois de prison avec sursis ont été requis à l’encontre du docteur Grasset. Une peine de 15 000 euros d’amendes et douze mois de prison avec sursis ont été requis à l’encontre de l’anesthésiste le docteur Paul-Henri Dulys et l’interdiction d’exercer pendant deux ans. À l’encontre de Pierre-Paul Tirolien, propriétaire de la Clinique où s’est produit le drame, et qui devait être fermée car pas aux normes, le procureur a requis 15 000 euros d’amendes et douze mois de prison avec sursis. Le procureur a également demandé que les condamnations qui seront prononcées soient publiées par voie de presse. Interrogés par Le Courrier de Guadeloupe après le procès, Claudius Bhiki et sa fille Katharina – mari et fille de la défunte — ont affirmé n’avoir pas trouvé leur compte.  » C’est comme si on avait jugé des gens qui avaient écrasé un chien dans la rue  » a déploré Katharina Bhiki.

Poster un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.