Concernant les thématiques qui impactent la campagne électorale en vue de ces élections départementales, on aurait pu tout imaginer. Mais peut-être pas le scénario qui semble se dessiner. J’ai d’ailleurs consacré le tout dernier éditorial du Courrier de Guadeloupe à cette question. À l’œuvre donc, depuis plusieurs mois, un désamour suffoquant entre Jacques Gillot et Victorin Lurel donnait le La à la campagne électorale. Ce profond soubassement du combat politique est bien sûr toujours d’actualité. Mais les sujets qui nourrissaient jusqu’ici en filigrane l’opposition entre les deux présidents d’assemblées sont désormais en retrait. Le sujet de l’eau – à tort d’ailleurs- ne secoue plus beaucoup les esprits. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’éclaboussera pas tout. À un moment ou à un autre. Car, même si sur ce sujet les querelles étaient plutôt feutrées, chacun avançait tout de même ses pions et bâtissait sa stratégie. Campagne électorale oblige. La crête de l’eau a désormais fait place aux vapeurs de l’essence. Les opérateurs du secteur des produits pétroliers se sont invités dans la campagne. Bien aidés en cela par Jacques Gillot qui leur a donné une tribune et une forme de légitimité, à faire irruption dans la campagne. Victorin Lurel a accepté d’entrer dans la danse. Et l’État a joué le jeu. Du coup, les gérants de station-service ont pris la main. Dans la foulée, ils ont convoqué une table ronde ce vendredi 13 mars avec les principaux acteurs de la filière, compagnies pétrolières, la SARA – qui jusqu’à récemment a toujours décliné toute participation un tant soit peu médiatisée —. Manière d’indiquer aussi aux autorités qu’ils n’ont pas invité les pétroliers et la raffinerie. Qu’ils ont tort. Et que l’erreur est réparée. Ensuite, les gérants de stations-service, et c’est surtout cela l’important, ont invité aussi les politiques. L’objectif c’est de peser sur la campagne électorale. La bête noire des pétroliers, de la SARA et des gérants de station-service c’est bien sûr Victorin Lurel coupable d’avoir pondu un décret qui met à mal leurs intérêts. En tendant une oreille attentive aux désidératas des gérants de station-service, Jacques Gillot, qu’il le veuille ou non, surfe sur cette vague d’opprobre jetée contre le président du conseil régional. Mais Victorin Lurel qui n’a pas les deux pieds dans le même soulier, lui aussi, sait y faire. Sa page Facebook s’est chargée de distiller des informations qui ne peuvent pas plaire aux gérants de station-service. De toute évidence, Victorin Lurel joue le camp des automobilistes. Ce positionnement vient conforter sa conviction selon laquelle, il était utile de mettre fin à une situation de monopole sans contrôle, qui permettait aux différents acteurs de la filière d’engranger des bénéfices colossaux. Pas sûr qu’au final le président de Région soit perdant dans cette partie. En attendant voilà une campagne électorale complètement envoûtée par le secteur des produits pétroliers. D’ailleurs, Ambition Guadeloupe, association à vocation politique qui a du mal à se faire entendre pendant cette campagne, a carrément mis ses pas dans ceux des gérants de station-service. Le communiqué qu’elle adresse à la presse pour la convoquer le mardi 10 mars dernier, adopte un ton dramatique. » Les gérants de station-service ont décidé de baisser leurs rideaux à la veille des élections départementales les 22 et 29 mars 2015. Les Guadeloupéens doivent pouvoir se rendre aux urnes massivement pour élire de nouveaux conseillers départementaux « . Bref, Ambition Guadeloupe se charge de faire circuler la menace de fermeture des stations brandie par les gérants. Sauf que cette menace ne vaut pas grand-chose. La loi permet désormais au préfet de réquisitionner 41 stations-service. Un tel nombre de stations ouvertes rend caduque tout blocage de la Guadeloupe. La SARA elle aussi est tenue d’approvisionner ces 41 stations-service. Le secteur pétrolier n’a peut-être pas toute l’emprise qu’il croit encore avoir sur la Guadeloupe.
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