Les élus du nord Grande-Terre sont en train de réussir un grand coup. Si aucun arrêt n’est porté au projet d’implantation de l’unité de transformation et de conditionnement de fruits et légumes qu’ils sont en train de peaufiner, tout un territoire sinistré depuis la fermeture de l’usine sucrière de Beauport sera dynamisé. Au-delà de la pertinence de l’initiative qui place l’agro-transformation au cœur du développement économique du territoire, c’est toute une révolution qui se met en place. Elle ne touche pas seulement les élus et les cadres administratifs qui travaillent au projet. Elle suscite aussi un engouement auprès des agriculteurs qui se sentent pleinement concernés.
« Transformer c’est gagner » répète inlassablement Philippe Hécher président de la Cuma nord Grande-Terre. Dans la bouche d’un agriculteur, cette formule a du sens. Philippe Hecher et la quasi-totalité des agriculteurs de ce territoire savent désormais où et comment capter la plus value de l’activité agricole. Ils l’ont si bien compris qu’ils se sont déjà organisés au sein d’un Groupement d’intérêt économique (GIE). Ils bousculent désormais les élus afin qu’ils « arrêtent de convoquer et de présider les grands-messes et qu’ils en viennent aux actions concrètes« . Cette initiative des élus du nord Grande-Terre est remarquable aussi parce qu’elle est à contre-courant de l’idéologie dominante qui veut que l’économie ne soit pas l’affaire du politique. La filière agro-transformation du nord Grande Terre, tord le cou à cette conception néolibérale en vogue en ce moment.
Le projet répond à une véritable stratégie économique avec un marché, un business plan, des fournisseurs organisés. Il vise aussi à la restructuration de tout un territoire. C’est une revalorisation des produits agricoles endogènes que les Guadeloupéens ont depuis longtemps négligée au profit de nourritures manufacturées importées. Du coup c’est un – petit – coup de frein porté à la principale source de profit à laquelle se sont converties la plupart des entreprises qui ont pignon sur rue dans ce pays, à savoir l’import. Le projet présente en germe deux autres intérêts. L’un est culturel. Servir aux enfants dans les cantines les légumes et les fruits de leur environnement les resitue dans leur réalité. L’autre touche à la santé. Le Dr Henri Joseph vous dira bien mieux que moi à quel point nos produits locaux sont source de santé à l’inverse de ceux que nous importons. Le nord Grande-Terre a trouvé sa voie. Il serait bon que chacune des régions déshéritées de la Guadeloupe trouve la sienne. Je pense surtout à la Côte sous-le-vent et à Marie-Galante. Il faut juste s’y mettre et y travailler et… qui sait ?
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